"Occupied - Saison 1" de Erik Skjoldbjærg, Karianne Lund et Jo Nesbø : politique-fiction
On peut facilement se gausser des prémisses de "Occupied", justifiant (?) la mise sous tutelle russe des installations pétrolières norvégiennes, et le début du bras de fer entre le Premier Ministre norvégien et les autorités russes de plus en plus "envahissantes", prémisses dont les incohérences et invraisemblances sont nombreuses. Si l'on fait l'impasse sur ses réserves qui n'ont finalement que peu d'importance, alors il faut bien reconnaître que "Occupied" est une jolie petite réussite : empruntant au meilleur du polar scandinave (Jo Nesbo est à l'origine du projet), soit ses personnages complexes, son manque de manichéisme simpliste et de sentimentalisme, et une sorte de noirceur atone qui en fait souvent le sel, "Occupied" dépasse le niveau du thriller habituel pour générer de passionnantes interrogations. Il n'est pas si difficile que cela en effet de repenser au comportement de la France de Vichy collaborant ardemment - ou au niveau des individus, de manière totalement intéressée financièrement - avec l'envahisseur, et aux balbutiement de la Résistance française, bien évidemment qualifiée de "terroriste" (n'oublions jamais alors que nous avons ce mot à la bouche 24 heures sur 24 heures, que les opposants aux régimes installés sont toujours qualifiés de terroristes...). Plus près de nous, les tactiques et manipulations diverses mises en place par la Russie pour gagner le contrôle de la Norvège sont tout-à-fait comparables à ce que nous avons vu - dans la "vraie vie" comme on dit - déployé en Crimée et en Ukraine en général : cette politique-fiction-là, aussi fragile soit-elle, s'avère quand même un formidable écho à notre réalité et nos angoisses contemporaines. Bref, "Occupied" divertit grâce à son rythme implacable, aux surprises de son scénario bien troussé qui ne ménage pas ses personnages, mais fait surtout beaucoup réfléchir pourvu qu'on accepte de jouer ce jeu fascinant du "et si..., et si...". Du coup on attend la seconde saison avec impatience.