"Exit le Fantôme" de Philip Roth : bientôt la fin ?
Lire cet "Exit le Fantôme" (traduction ridicule du titre original, "Exit Ghost", mais bon...) n'est pas vraiment une partie de plaisir : voilà Philip Roth - écrivain "puissant", voire visionnaire, s'il y en a eu ces dernières années - qui abandonne peu à peu tous les oripeaux non seulement de l'écrivain "public", mais aussi de l'homme, déchu par la vieillesse et la décrépitude physique de son essence même. Roth alterne ici des passages pénibles, très "vieux con qui râle contre ce que le monde est devenu", sur l'usage du téléphone portable, sur l'inanité de la critique littéraire contemporaine, sur les peurs de ses contemporains, sans que son habituelle ironie ne se teinte plus de compassion ou de simple empathie envers ses victimes : comme beaucoup de personnes trop âgées, Roth paraît surtout submergé de haine (voir le personnage insupportable de Kliman) et plus trop intéressé par ce qui se passe en dehors des défaillances de son corps usé, et par une ultime visite d'un passé désormais tout-à-fait mort. Tout cela est accablant, surtout de la part d'un géant de la littérature ! Pourtant, Roth pourrait nous raconter l'annuaire téléphonique de New York que cela resterait passionnant : pourquoi ? Simplement parce que, a contrario de milliers de ses contemporains qui se jugent "écrivains", il SAIT écrire. lui. Du coup, "Exit le Fantôme" transcende ses thèmes un peu rances pour devenir, envers et contre l'intelligence déclinante de son auteur, un autre livre fascinant, souvent réjouissant, parfois même brillant.