"Hunters - Saison 2" de David Weil : Réécrire l'histoire...
Il y a trois ans, on avait été horrifiés par la première saison de ce Hunters, qui, en piquant l’idée de Tarantino pour Inglourious Basterds, proposait une Histoire alternative où des Juifs, survivants ou descendants de survivants de la Shoah chassaient dans les années 70 les Nazis qui avaient réussi à s’échapper pour les exécuter. Hormis le fait que ce principe contredisait violemment l’éthique de véritables chasseurs de Nazis comme Simon Wiesenthal ou comme les Klarsfeld, dont le but était d’amener les criminels de guerre devant la justice, Hunters partait complètement en vrille du fait d’une représentation ridicule, et inacceptable, des camps de concentration. Accablés par la critique, David Weil et son équipe avaient alors disparus des radars pendant trois ans, et on avait pu espérer que ce projet insensé avait été définitivement enterré.
Or, il n’en était rien, et voici que Prime, en ce beau mois de janvier 2023, nous assène une nouvelle bordée de huit épisodes (au lieu de dix, il n’y a pas de petits bonheurs…), tout en nous jurant que ce serait la dernière. Rassurons tout de suite ceux qui nous plaignent déjà de nous être infligés une nouvelle séance de torture, Weil a bien pris en compte les critiques : pas de retour à Auschwitz cette fois, et un objectif bien plus « moralement acceptable », puisqu’il s’agit de capturer Adolf Hitler caché en Argentine pour le remettre à la justice et lui organiser enfin le procès qu’il mérite.
Moins insupportable donc, cette fiction dystopique n’en est pas devenu vraiment meilleure : bourrée d’invraisemblances absurdes qui la placent au niveau d’une mauvaise BD pour adolescents ignares, elle souffre d’un scénario particulièrement indigent, alternant de longues scènes sans intérêt et de de brefs moments de violence spectaculaire, où nos héros semblent littéralement intouchables aux balles des hordes de néo-nazis en face d’eux, qui eux, tombent comme des Stormtroopers dans Star Wars. L’interprétation générale reste très faible, avec un personnage principal qui continue à être trop falot pour nous intéresser (pauvre Logan Lerman, que l’on espère bien ne jamais revoir !), et un Al Pacino en mode de figuration paresseuse dans un flashback qui ne fait guère que mettre en évidence l’absurdité du retournement final de la première saison, et qui n’a été écrit que pour amener une seconde révélation à la fin de cette saison. On sauvera la prestation de l’éternellement dérangeant Udo Kier, qui incarne un Adolph Hitler particulièrement glauque, finalement assez mémorable.
Mais le vrai problème reste ce fameux procès d’Hitler, dans un épisode final d’une bêtise qui le rend quasiment irregardable : n’ayant pas pris, visiblement, la peine de réfléchir à comment aurait pu se dérouler un tel événement (il suffisait pourtant de se documenter sur le Procès de Munich !), Weil et son co-scénariste se contentent de dérouler paresseusement tous les stéréotypes hollywoodiens, entre un juge qui semble hostile à l’accusation et chicane sur tout, des moments d’émotion larmoyants (soit le degré zéro de l’intelligence) des rescapés de l’Holocauste, et des états d’âme de l’avocat d’Hitler (juif, bien sûr)… Tout cela est d’une bêtise embarrassante, et ne sert pas les objectifs sans doute honorables des « auteurs » : rappeler aux plus jeunes téléspectateurs la réalité de l’extermination de masse du peuple juif, et faire un lien entre le nazisme et la résurgence actuelle des mouvements d’extrême droite, en particulier aux USA.
Pour finir sur la seule note positive de cette affaire, il y a au milieu de cette débâcle un très joli épisode, The Home, le septième, qui adopte un ton burlesque et semi-fantastique pour rejouer (décidément, c’est une obsession chez Weil) la scène d’ouverture de Inglourious Basterds, où des SS chasseurs de juifs viennent enquêter dans une maison où est cachée une famille juive. Cette heure-là, très réussie, peut être visionnée de manière totalement indépendante de la série, et nous vous recommandons de ne pas hésiter à le faire. Il n’y a guère que le fait que, curieusement puisque ce n’est pas le cas dans le reste de la série, tous les personnages – allemands – parlent anglais avec un fort accent germanique, selon les codes dépassés du cinéma hollywoodien, ce qui gâche un peu notre plaisir : on prendra ça pour un clin d’œil ironique, faisant écho à l’aspect fantaisiste de l’épisode.
En tous cas, on est heureux que l’affaire Hunters soit définitivement classée, et de ne plus avoir à y revenir.