The Wants au Supersonic (Paris) le vendredi 6 mars
22h40 : le trio de Brooklyn, The Wants, ont maintenant rempli le Supersonic jusqu'à ras bord : c'est bon signe, la hype fonctionne, il nous reste à nous confronter à la réalité. Sur scène, trois jeunes gens vêtus de noir, au look austère comme il faut : un batteur décontracté, une jeune femme bien mise à la basse, un géant assez inquiétant à la guitare, qui s’avère être Madison Velding-VanDam, membre de Bodega et leader de cette nouvelle expérience misicale. Et quand ça démarre, on est sur le c..., immédiatement.
Le son de The Wants, c'est le exactement le son de 2020 : sec, dur, épileptique même, nourri paradoxalement d'électronique. On cherche les références, on parcourt notre mémoire : Devo, Talking Heads, Wire, XTC des tous débuts, la furie des premiers titres des B-52's même. Mais en fait, non, pas du tout : The Wants, ce n'est pas le passé qui se répète, c'est du tout nouveau. Car, au-delà des moments où l'on danse, des légères connotations électroniques, voilà que surgit d'un coup une guitare littéralement tellurique, qui vient noyer tout ça dans un déluge sonore radical. Sonic Youth qui jouerait du heavy metal, mais avec des coups de scalpel dans la masse : tranchant, oui c'est ça. Madison a un jeu de scène saisissant, un déhanché spectaculaire (magnifique ?), une ambiguïté absolue, on va dire mi-féminin, mi-aliéné. Le voir arpenter la petite scène du Supersonic en larguant du plomb fondu sur les rythmiques de mécaniques emballées des chansons est une grande expérience. L'une de celles dont on se souviendra longtemps, toujours peut-être.
Il y a deux ou trois moments au cours des courtes quarante-cinq minutes, rappel compris, du set de The Wants, où tout le premier rang de spectateurs échange des regards de connivence, de soulagement, d’incrédulité, même : oui, ce soir, c'est ça, c'est exactement ça. Ce qu'on attend et qui arrive si peu souvent. C'est une joie, aussi, une satisfaction profonde, que d’assister à la naissance d’une MUSIQUE.
Bon, malgré notre enthousiasme absolu, admettons que tous les morceaux ne seront pas à la même hauteur stratosphérique, bien sûr, mais affirmons sans crainte que les chansons un tantinet moins extraordinaires auront été au moins passionnantes, innovantes ou surprenantes... c'est dire...
L'album de The Wants va sortir dans quelques jours, et le groupe ne nous appartiendra plus. Tiendra-t-il toutes ses promesses ? Impossible de le jurer, mais au moins, ce soir au Supersonic, l’enchantement a fonctionné à plein.