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Le journal de Pok
30 juillet 2020

"Jump Rope Gazers" de The Beths : le terrible syndrome du second album...

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En 2018, il avait été difficile de ne pas être enthousiasmés devant l’énergie dégagée par le premier album de The Beths (Future Me Hates Me) : il n’était même pas nécessaire d’être – comme nous – fans absolus de la pop et du rock néo-zélandais, qui, rappelons-le, tutoie l’excellence depuis les années 80 dans l’indifférence du reste de la planète, pour aimer ce groupe énervé, balançant des textes d’une réjouissante vacherie sur des riffs de guitare bien agressifs… sans même parler de ces vocaux qui se bousculaient devant le micro !

En 2020, il est beaucoup plus délicat de s’extasier devant Jump Rope Gazers, le second album des mêmes The Beths, qui… semble avoir été victime de la classique malédiction du… second album ! Le côté positif : deux ans de gestation, typiques d’un groupe cherchant à se renouveler plutôt que de refaire le même premier disque en moins bien. Le côté négatif : deux ans de gestation qui semblent avoir surtout servi au groupe à polir excessivement sa musique, à la diluer au fil d’idées qui sont tout sauf révolutionnaires. Finalement, Jump Rope Gazers ressemble à un nouvel album des Throwing Muses, ce qui est un compliment de notre part, mais n’est pas forcément ce qu’on attendait d’eux, surtout à une époque où l’on déplore déjà beaucoup le recyclage dans le Rock des recettes du passé !

Jump Rope Gazers commence très bien, avec un I’m Not Getting Excited au titre mensonger, puisque l’excitation est au rendez-vous, en même temps que la méchante déprime qui est une sorte de marque de fabrique des textes malins d’Elizabeth Stokes : « When I smile, I lie / With my eye to the side / So I greet with goodbye… ».  Bravo ! Dying to Believe fait aussi le job, et enfonce le clou de l’auto-insatisfaction : « I'm sorry for the way that I can't hold conversations / It's such a fragile thing to try support the weight of / It's not that I don't think that my point of view is valid / It's just that I can't stand the sound of my own patterns », et on réjouit des frivolités (backing-) vocales, toute en légèreté (en ironie) qui offrent un contre-point bienvenue à ces textes sombres.

C’est avec le mid-tempo de la passablement insignifiante Jump Rope Gazers - même si elle donne son titre à l’album – que les choses se gâtent : difficile de se sentir passionnés par cette musique trop jolie, trop bien produite, trop propre sur elle pour son propre bien. Il faut admettre que nous sommes un peu injustes en reprochant à The Beths ce travail trop soigné, surtout si l’on admet que le travail vocal reste charmant, et que qui aime les guitares électriques sera encore régulièrement à la fête… Mais n’avions pas vraiment besoin de la pop gentillette de Do You Want Me Know, vraiment trop passe-partout, et qui ne met pas en valeur les sentiments dépressifs et angoissés (« In the dead of night / I'm a condemned site with the light on ») que la chanson est sensée transmettre. Don’t Go Away n’est pas plus mémorable, tout sucré, sans que sa mélodie fûtée et ses irruptions de guitares ne viennent rajouter quoi que ce soit à ce qui sonne comme des clichés d’une power pop déjà bien trop entendue ailleurs.

Mars, the God of War – joli titre – réinjecte heureusement de l’énergie pour la dernière ligne droite de l’album, et nous réjouira par ses petites vacheries bien balancées (« I wish that I could wish you well / Instead I'm hitting my head and hitting backspace on /“Can't you just go to hell?” »). You are a Beam of Light nous fait le coup de la pause acoustique, atmosphérique et pleine d’émotion, avant la fin, mais sonne aussi bien trop entendue déjà… Et nous voilà déjà au bout de l’album, avec une longue chanson qui sonne, on l’espère, comme un bilan : Just Shy of Sure. Guitares cristallines, vocaux parfaits, so what ?

Après nous avoir montré leur impeccable savoir-faire sur cet album qui semble surtout inutile, gageons que The Beths sauront passer à autre chose, nous surprendre, et retrouver ainsi le chemin de notre cœur.

 

 

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