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Le journal de Pok
8 mai 2024

"LaRoy" de Shane Atkinson : Fargo au Texas ?

L’histoire de LaRoy, c’est celle de quelques beaux exemplaires de « l’Amérique profonde » – que l’on pourrait qualifier de « losers », si le terme n’était pas finalement une forme de mépris de classe dans ce contexte – qui se morfondent dans une vie médiocre, jusqu’au moment où le hasard fait passer a leur portée un petit magot (250.000 dollars, pas des millions non plus !) : une occasion de changer de vie – ou pas, en fait – qui va les précipiter dans un enchaînement d’événements dramatiques, où une série de mauvaises (ou de très mauvaises) décisions aura des conséquences désastreuses. Les personnages sont à peu près tous pas vraiment futés, ont des problèmes ordinaires de couple ou de famille devant lesquels ils fuient, une moralité à géométrie variable et, pour ne rien arranger, font preuve d’une maladresse consternante.

Ça vous rappelle quelque chose ? L’univers des Frères Coen, et de leur film Fargo en particulier, bien sûr ! Dans LaRoy, qu’on nous présente aussi comme une ville perdue dans un décor désolé (il semblerait qu’il existe au Texas une véritable bourgade nommée « LeRoy »…), il fait chaud, mais cette question de température est bien la plus grande différence entre le film de Shane Atkinson et celui des Coen Bros, dont il copie sans vergogne le style, voire même certains personnages et certains aspects du scénario.

Malheureusement, LaRoy est sorti dans les salles françaises dans la foulée du nouveau film d’Ethan Coen (Drive-Away Dolls), arpentant le même territoire : un Mcguffin policier, de l’humour noir et des scènes grotesques, sur un fond de (légère) satire sociale de la classe moyenne US. Tout le monde est allé voir le Coen, pour le trouver mauvais, personne n’a vu le Atkinson, qui, sans atteindre des sommets, tire son épingle du jeu et fera au moins passer à tout le monde un bon moment.

Par rapport aux meilleures œuvres des Coen, il manque ici ce curieux vertige métaphysique qui permet d’élever un film au dessus du niveau de la bonne blague. Il manque aussi une bonne finition d’un scénario qui passe souvent en force, en espérant que le spectateur, abusé par la complexité de l’intrigue policière, n’y verra que du feu : rien de dramatique, le film fonctionne, mais on se dit qu’un peu plus de travail aurait permis d’éviter des raccourcis faciles et des coïncidences commodes, qui font toujours tache au milieu d’un polar.

En fait, ce qui fait que, malgré tout, on aime bien LaRoy, c’est sa galerie de personnages, tous impeccablement incarnés par des acteurs peu connus mais faisant preuve de ce talent qu’on célèbre toujours chez les seconds rôles du cinéma US. Dylan Baker est particulièrement fascinant en tueur à gages froid, mais pas toujours compétent, dès une scène d’introduction originale et culottée, au point qu’on regrette de ne pas plus le voir. Steve Zahn, qui passa il y a une vingtaine d’années près du succès populaire, est très bon, conférant de la profondeur et de l’humanité à un personnages de pseudo Private Eye déguisé en cowboy d’opérette qui autorisait toutes les caricatures. La mise en scène de Sheridan est assez routinière et prive le film d’un dynamisme narratif qui lui aurait fait du bien.

Mais, d’une manière générale, on ne s’ennuie pas, on rit beaucoup et on s’intéresse à la résolution d’une énigme faussement compliquée. Bref, on passe 100 minutes bien agréables devant ce petit film qui ne court que le risque d’être oublié dès que l’on sort de la salle.

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