Mogwai à la Salle Pleyel (Paris) le samedi 7 mai
21h05 : La scène de Pleyel est très large pour des musiciens qui ne bougent pas beaucoup comme ceux de Mogwai, concentrés comme ils le sont sur la parfaite exécution de leur post-rock aussi précis que brûlant, et nous avons eu pas mal de chance en nous plaçant au hasard sur la droite, ce qui s’avérera juste devant Stuart Braithwaite, le « leader » (même si on imagine bien qu’il n’aimerait pas ce qualificatif…) du groupe. De plus, il joue assez près du bord de la scène, alors que les autres musiciens sont plus en recul, voire au fond de la scène lorsqu’ils s’assoient – comme le fera régulièrement Barry Burns – aux synthés. A noter aussi la présence, loin sur notre gauche, du jeune guitariste Alex Mackay, qui vient renforcer le quatuor sur scène, et est responsable de plusieurs passages très noise et spectaculaires.
L’objectif de ce concert est de promouvoir leur dernier album – 5 titres sur les 11 seront joués – mais le set va aussi faire la part belle à des titres plus anciens, régulièrement accueillis par des cris de joie par les fans passionnés qui ont quasiment rempli la Salle Pleyel. Il est inutile de le dire, vu le lieu, mais le son (en tous cas des premiers rangs…) est absolument parfait, mais également bien fort pour que l’immersion dans la musique puisse se produire aisément.
Par rapport à leur interprétation plutôt planante et sensible sur l’album, les nouveaux titres sont – et c’est tant mieux – joués avec un maximum d’intensité. Si la première partie du concert est satisfaisante par sa beauté, sa précision, et par le talent que manifeste le groupe à nous emporter avec lui dans un univers finalement assez cinématographique, la soirée se met à décoller véritablement pendant ses dernières quarante minutes, terrassantes : ce sera pour nous le sublime crescendo de Midnight Fit qui va apporter cette sorte de libération, à la fois physique et mentale, qui fait que l’on est, d’un coup, littéralement balayé, comme un fétus de paille, par les vagues sonores. La furie très rock – et plus tellement post-, du coup - de Ceiling Granny matérialise ensuite cet envol électrique, cette intensité sublime, qui ne redescendra plus jusqu’à la fin, jusqu’aux 10 minutes épiques de Like Herod, qui nous ramènent à notre découverte du groupe, avec leur premier album, Young Team. Tous les fans le savent, Like Herod, c’est une alternance infernale de moments extrêmement doux, où les arpèges de guitare se font particulièrement retenus, mélancoliques, et d’explosions de violence terrifiantes : la guitare de Stuart hurle littéralement, la rythmique est dantesque, c’est un maelstrom colossal de musique qui s’ouvre à nos pieds et nous engloutit. Après ça, nous n’aurions presque pas besoin de rappel, l’essentiel de la musique de Mogwai a été à nouveau exprimé.
Mais nous aurons, bien sûr, droit à un rappel, qui débutera par Ritchie Sacramento, l’un des rares moments chantés de la discographie de Mogwai. D’abord, avouons que ce retour de la voix humaine nous fait un bien immense : Stuart a une excellente voix, et le refrain nostalgique est tout simplement magnifique : « Disappear in the sun / All gone, all gone / It took a while just to think / Of home, of home » (Disparaître au soleil / Tout est parti, tout est parti / Il a fallu un moment juste pour penser / A la maison, à la maison…). Tiens, et pourquoi donc est-ce que Mogwai ne changerait pas de style musical, et n’abandonnerait-il pas pour une seconde carrière le post-rock pour devenir un groupe plus classique ? Ritchie Sacramento prouve que ce serait très beau…
Final traditionnel, un peu dans la logique bruitiste de My Bloody Valentine (mais avec plus de compassion pour notre ouïe…), sur Mogwai Fear Satan, les 15 minutes radicales que tout le monde attend. A la fin, les instruments sont abandonnés gémissant et grondant, seuls sur scène. Et c’est fini.
Mogwai est grand.