"Annihilation" de Alex Garland : les couleurs tombées du ciel
Attention à ce que vous souhaitez, car ça pourrait bien se réaliser... Depuis 40 ans et le désastre intellectuel et artistique que fut pour la planète le succès de "Star Wars" (une sorte d'annihilation - du bon goût et de l'intelligence - si on y réfléchit bien...), le vieux fan de SciFi pure et dure que je suis espérait une (re)naissance du genre à l'écran. Eh bien, nous y voilà : les films de SF ambitieux se multiplient, aux mains qui plus est de jeunes auteurs talentueux qui connaissent leurs classiques (Kubrick, Tarkowski, Cronenberg, inévitablement) et n'ont pas froid aux yeux. Et le résultat, la plupart du temps... n'est pas vraiment beau à voir...
Prenez le cas de Garland et de "Annihilation", par exemple : un sujet de poids mais joliment classique (la conquête de la Terre d'une manière radicale via le chamboulement de toutes les règles physiques), des choix artistiques psychédéliques inhabituels et parfaitement réussis (les fans de drogues parmi les spectateurs sauront y reconnaître leur came, je suppose), des acteurs de première classe (Portman et Isaac, quand même !)... pour déboucher sur un "machin" ni fait ni à faire, bourré de n'importe quoi, un gloubi boulga indigeste avec des morceaux de films de monstres et une accumulation indécente de références dedans, qui nous laisse complètement froids. Dépités. A part dix minutes sympathiques sur la fin, avec le ballet de la duplication qui nous réveille de notre somnolence - mais avant l'inévitable final twist tout pourri qui garantit le mauvais souvenir du film -, il n'y a quasiment rien à sauver de "Annihilation", si ce n'est son ambition.
Alors on dédouanera sans doute Garland en arguant "l'effet Netflix", ce moderne anti-Midas qui transforme systématiquement tout ce qu'il touche en bouse. On acceptera même que tout le monde ne s'appelle pas Denis Villeneuve (les similitudes avec "The Arrival" font vraiment mal à "Annihilation"). Mais on se dit que, la prochaine fois, on ira plutôt voir, tiens disons un Kechiche qui nous parle de plage, de soleil et de sexe, plutôt que de perdre notre temps à rêver à d'impossibles films de SF réussis.