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Le journal de Pok
28 avril 2024

"Hopeless" de Kim Chang-Hoon : noir, c’est noir…

Depuis son explosion à la fin du siècle dernier, le cinéma coréen nous a épaté en faisant reculer, de film en film, les limites de ce qu’on pouvait montrer comme brutalités et comme horreurs psychologiques aussi, à l’écran, sans pour autant perdre en qualité, ridiculisant pour le coup un gros pan du cinéma US. On avait l’impression que cette course à la noirceur s’était tassée ces derniers temps, ce qui n’était pas un mal en soi. Et puis déboule Hopeless (titre parfaitement adéquat), premier film d’un certain Kim Chang-Hoon, qui a clairement décidé de faire parler de lui en nous imposant une œuvre totalement accablante.

Yeon-gyu est un lycéen issu des couches défavorisée d’une ville de province peu reluisante. A la maison, il se fait battre comme plâtre par son beau-père alcoolique. Au lycée, il est devenu la bête noire des caïds parce qu’il a défendu l’honneur sa demi-soeur, Ha-yan. Au travail – il est livreur dans un restaurant minable connu pour ses nouilles noires -, il fait la connaissance d’un enfant qui se fera à moitié tuer du fait des dettes accumulées par son misérable père. Un soir où une nouvelle correction de son beau-père le laisse défiguré, il rejoint les rangs d’une bande de truands minables, trafiquants de motos volées et usuriers, menés par un chef énigmatique qui se prend d’affection pour lui. A partir de là, tout va aller encore plus mal (oui, c’est possible)…

Plutôt mal reçu à Cannes du fait de sa longueur excessive par rapport à un scénario finalement assez simple et prévisible (mais souvent fatiguant par les allers et retours de son héros égaré, hésitant en permanence entre une vie criminelle et d’évidentes préoccupations morales), Hopeless a été remonté et coupé d’une dizaine de minutes, ce qui a pour effet de le rendre surtout moins compréhensible : nombre de péripéties ou de décisions de Yeon-gyu apparaissent assez obscures pour le coup… même si cette construction énigmatique, conjuguée à un joli savoir-faire de mise en scène (… surtout pour un premier film) génèrent finalement un certain intérêt pour un film qui, sinon, semblerait surtout une accumulation exagérée de problèmes sociétaux et de rebondissements catastrophiques de sa partie « thriller ».

Bien entendu, comme dans tout thriller coréen, l’habituelle absence d’armes à feu, remplacées par des battes de base ball, des couteaux et des instruments contondants et tranchants en tous genre (on appréciera l’usage du sac en plastique rempli de vis et de clous, de la tenaille, et du massicot !) nous vaut une série de scènes difficilement supportables à l’écran, même pour les plus blasés. On peut néanmoins difficilement juger que cet extrémisme sanglant est une qualité de Hopeless… Par contre, il faut admettre que quelque chose de troublant subsiste derrière le désespoir poisseux et la violence extrême : les liens entre Yeon-gyu et Ha-yan, mais surtout entre Yeon-gyu et le très charismatique Chi-geon (superbe interprétation de Song Joong-Ki), nourris par une ambiguïté permanente, jamais franchement explicités (et c’est tant mieux), font naître régulièrement une émotion intense qui est le meilleur du film.

On conseillera donc à Kim Chang-Hoon de poursuivre plutôt sur cette voie de la peinture des sentiments complexes plutôt que de continuer à nous assommer avec un univers plus noir que noir.

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