Voici donc le troisième album de l'immense Caetano Veloso réalisé avec un petit groupe de rock, Cê, au style musical à la fois sec et (légèrement) avant-gardiste. S'il est indéniable que prendre ses distances avec la perfection un peu académique de ses productions a redonné une nouvelle jeunesse, ou en tout cas une spontanéité bienvenue à Veloso, on retrouve largement dans ce superbe "Abraçaço" les climats subtilement mélancoliques (allez, on peut parler du cliché de la "saudade", bien sûr !) de ses oeuvres plus classiques. Les puristes au Brésil disent qu'il y a trois "grandes" chansons - de futurs classiques - de Caetano dans cet album, et que le reste n'est guère composé que de "bons" morceaux, moi j'oserais affirmer que ça nous va bien comme ça : Caetano aligne morceaux politiques qui prouvent que "l'indignation" a plus que jamais sa place dans le Brésil moderne, fantaisies (à demi) joyeuses proches des riches traditions musicales du pays, et, bien entendu, chansons sentimentales d'une sensibilité déchirante qui n'échouent jamais à nous remplir les yeux de larmes... le tout, malgré - ou à cause de - la liberté de ton qui exclut tout perfectionnisme, constitue un court voyage vers les cîmes de la musique contemporaines. Attention à ne pas fossiliser Caetano, son génie reste vivant et actuel.