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Le journal de Pok
10 janvier 2020

"les Enfants du Temps" de Makoto Shinkai : les passagers de la pluie

Les enfants du temps affiche

La découverte, début 2017, du "Your Name" du même Makoto Shinkai nous avait conduit, nous qui ne sommes pas forcément experts de l’Anime, à nous intéresser à cet auteur singulier, dont le film regorgeait littéralement de moments enchantés, et de concepts stimulants, ce qui nous permettait de passer outre un certain nombre de scories jugées comme rebutantes par nombre de spectateurs : une tendance à la niaiserie sentimentale et un abus de chansons de variété japonaise assez écœurantes… qui n’arrivaient pas à gâcher le plaisir intense procuré par le film…

Le problème des "Enfants du Temps", malheureusement, c’est que les mêmes défauts sont toujours là, avec en plus des moments réellement embarrassants de rires idiots liés à l’éveil a sexualité chez les personnages adolescents, mais que les qualités sont nettement moins convaincantes. Au point que si l’on avait à lister les points forts du film, on serait bien en peine d’en trouver au-delà de l’esthétique époustouflante du film…

Car esthétiquement, "les Enfants du Temps" (traduction française particulièrement maladroite, puisque le film parle d’adolescents arrivant à l’âge adulte, et que le Temps dont on parle ici est celui qu’il fait, et non celui qui passe…), est absolument superbe, arrivant à recréer presque de manière magique les sentiments que nous ressentons tous devant une pluie battante, un ciel menaçant ou un rayon de soleil qui perce les nuages. Avec en plus un beau travail sonore – si l’on excepte bien sûr les atroces chansons qui gâchent régulièrement notre plaisir -, et avec des effets 3D qui restent la plupart du temps assez bien utilisés pour ne pas gâcher la superbe élégance du graphisme « traditionnel », on n’est pas loin de ce que l’animation mondiale peut nous offrir de plus exquis, de plus délicat… Confirmant en passant la supériorité esthétique écrasante de l’Anime à la Japonaise sur la technologie perfectionniste américaine…

 

 

Le problème de "Weathering With You" (allez, on va s’en tenir au titre international bien meilleur !) est absolument tout le reste : avant tout un scénario qui reprend à la lettre le déroulé de celui de "Your Name", mais qui enchaîne des situations improbables et, pire encore, s’avère franchement inintéressant, malgré un effort de redressement aux trois quarts de l’histoire… ne débouchant malheureusement que sur une fin en forme de cliché lourdaud d’une naïveté confondante… Ensuite des personnages largement stéréotypés, dont les réactions répondent à la fois aux codes les plus convenus du manga et de l’anime, et aux attentes – du moins on l’imagine – des adolescents en pleine crise de puberté. Et enfin, et c’est plus grave, une impuissance à traiter correctement le thème pourtant puissant – et si actuel – du dérèglement climatique et de ses conséquences potentiellement apocalyptiques pour la société.

Car c’est finalement bien sur ce point-là que Shinkai se tire une balle dans le pied : d’une certaine manière, en dédouanant ses héros de leur responsabilité sur les changements climatiques (« ce n’est pas de ta faute » est une des dernières phrases du film, ou encore « avant l’arrivée de l’homme, la Nature était comme ça » !), et en minimisant l’impact du dérèglement sur l’avenir des personnages (là encore, les derniers dialogues font état que, de toute manière, « on sera heureux… »), Shinkai semble adhérer aux opinions les plus rétrogrades actuelles. Ce n’est probablement pas là le fond de sa pensée, accordons-lui le bénéfice du doute, mais c’est tout de même diablement maladroit quand son film avait le potentiel d’être un cri d’alarme à l’intention de la jeunesse…

Il est évidemment douloureux de ne pas pouvoir défendre une œuvre d’un artiste aussi important que Shinkai, mais plus encore de ne pas être arrivés pendant près de deux heures à jamais dépasser la simple fascination un peu engourdie devant de très belles images…

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