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Le journal de Pok
11 septembre 2018

Revoyons les classiques du cinéma français : "le Corbeau" de H.G. Clouzot (1943)

Le Corbeau

"Le Corbeau", qui est par ailleurs un film indubitablement impressionnant, et que j'ai enfin revu dans une version joliment restaurée, m'a permis de confirmer ce que je n'aime pas, mais alors pas du tout chez Clouzot : cette haine profonde de l'humanité, ce mépris éclatant pour l'ensemble de ses personnages, dont aucun n'est sauvable. Un anti-Renoir absolu donc. Ceci dit, pourquoi pas ? Von Trier utilise bien ce même pessimisme irréductible pour faire des films superbes ! Le problème chez Clouzot, pour moi, est qu'il ne fait justement rien de ce constat dévastateur, au delà de la froide description de l'impossibilité absolue de la moindre transcendance, du moindre sentiment véritable, sans même parler de position "politique".

Regardez le personnage "principal" du Corbeau, impeccablement interprété par le toujours magnifique Pierre Fresnay : petit bourgeois arrogant qui se nourrit de sn propre malheur et méprisera jusqu'au bout la populace de ce village où il est venu s'enterrer, couchant avec l'une et séduisant l'autre pour finir par se résigner cyniquement à avoir un autre enfant. On notera le pitoyable de son enquête policière, puisqu'il se fera abuser jusqu'à la fin sur l'identité du "corbeau", et qu'il aura envoyé sans regret une jeune femme à l'asile psychiatrique : le personnage est abject, insauvable, et il est ce que Clouzot nous offre de mieux comme "role model" dans son film. On me rétorquera que, comme chez Céline, la "saloperie" de la société dans lequel il vit (ici la France collabo et visqueuse de l'Occupation) explique, voire justifie ce radicalisme : peut-être, peut-être… Mais la forme glaciale et impeccable du thriller contredit et annule ici la possible force pamphlétaire du sujet.

Bref, une fois encore, j'ai vu ici une mécanique parfaite - seulement mise à mal dans sa dernière partie par un scénario à rebondissements plutôt maladroit - au service de… rien de particulier. Donc un film aussi profondément immoral que la galerie de portraits ignobles qu'il nous fait visiter.

Non, je n'aime pas Clouzot.

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