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Le journal de Pok
6 avril 2020

"Star Trek : Picard" de Alex Kurtzman, Michael Chabon, Akiva Goldsman : les charmes de la Picardie

Star Trek Picard affiche

Ne le nions pas, l'accès à "Star Trek : Picard" pour un néophyte, ou tout au moins quelqu'un qui n'a pas suivi l'interminable saga de la série TV originale et des films (les "originaux", pas le reboot, beaucoup plus gentiment spectaculaire et "viewer-friendly"), est mal aisé. Avouons même qu'on ne comprend pas grand chose à ces histoires vraiment compliquées de Romulans et de Borgs, et que du coup on s'ennuie gentiment, en pouffant occasionnellement de rire devant la vision de ce soi-disant propriétaire récoltant français - incapable bien sûr de prononcer correctement le moindre mot de sa "langue natale" - se promenant dans ses vignes dans une lumière publicitaire sans aucune vergogne (bon, les producteurs de Côtes du Rhône remercieront Amazon pour ce coup de pouce à leurs ventes...).

Et puis, peu à peu, il faut bien dire que quelque chose se met en place, pourvu qu'on ait la patience de suivre une intrigue ni très crédible, ni très efficace : la multiplication de lieux, de personnages et d'actions est sans doute excessive, témoignant sans doute de la crainte des scénaristes de tomber dans le travers habituel des séries actuelles, généralement trop étirées par rapport à la faiblesse de leurs intrigues; Ici, ça foisonne sec, les décors changent, les conflits se multiplient, et même si tout n'est pas bon, même si tout ne fonctionne pas, on se laisser emporter avec plaisir dans cet univers baroque, un peu kitsch, où même les créatures les plus exotiques ne sont guère que des humains avec quelques accessoires digitaux. Ce qui fait évidemment du bien, c'est que, en dépit d'un budget que l'on imagine confortable, "Picard" ne nous assomme pas d'action, et que l'on reste la plupart du temps entre gens de bonne compagnie en train de discuter le bout de gras, ou en train de se prendre la tête à propos de dilemmes politiques et moraux.

Car "Picard" se veut avant tout une réflexion - à l'américaine, quand même, donc pas trop compliquée - sur des sujets "contemporains", voire "à la mode" : la peur de l'humanité devant le développement de l'Intelligence Artificielle, la responsabilité des organisations globales comme les Nations Unies vis à vis des populations victimes de conflits, le rôle des politiques dans la préservation de la démocratie face à la résurgence des traditions, religieuses en particulier, etc. Il y a donc du grain à moudre, et la vision du monde supportée par le personnage (de "vieux sage") de Picard, – conférant à la série une ambiance « crépusculaire » de recueillement, voire de deuil -, est clairement opposée aux idéologies trumpienne ou macroniste de notre époque : "Star Trek" place "l'humain" au centre de sa fiction, et rappelle que la responsabilité de l'état est de protéger les siens... même si, en bonne série américaine, elle n'oublie jamais non plus de nous remémorer, en particulier dans une conclusion grandiloquente et plus discutable, que chacun reste totalement libre de ses choix et responsable de ses décisions et donc de son destin.

Car les deux derniers épisodes sont sans nul doute ceux qui justifient le visionnage de cette série, car ils conjuguent plutôt habilement une montée finale de la tension - avec une résolution à la mode "WTF", mais qu'importe finalement - et réflexion rêveuse sur la nature de l'humanité, joliment associée à sa mortalité, à son statut éphémère. Si l'on se serait bien passé des dix dernières minutes en forme de happy end réconciliateur, avec hommage discret et un peu putassier à la communauté LGBT, il faut bien reconnaître que ce climat de bienveillance que finit par promouvoir cette série peu banale nous fait beaucoup de bien.

 

 



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