"Robbie" d'Olivier Bruneau et Emilie Gleason : teen zombie !
Robbie se réveille : il est dans une tombe ! Quand il en émerge et se réfugie dans l’église voisine, il doit se rendre à l’évidence, il est mort, et le voilà maintenant devenu un zombie ! Que peut-il faire ? Revivre ? Mourir définitivement ? Mais surtout il aimerait bien comprendre ce qui s'est passé, et comment il en est arrivé là. Heureusement pour Robbie, bien mal en point physiquement comme mentalement, il va rencontrer Carrie, une adolescente, elle-même assez « perturbée », il faut l’admettre, qui va l’aider dans sa quête. Une quête qui doit être conduite en 3 jours, délai maximum fixé par la Mort !
Sans aucune fausse modestie mais avec énormément d’humour, Olivier Bruneau, l’inventeur de l’histoire de Robbie – par ailleurs auteur de « vraie » littérature – nous promet qu’en accompagnant Robbie dans son aventure, nous comprendrons le « sens de la vie », ou sinon, au moins, le « sens de la mort »… Robbie a d’emblée tous les atours d’une partie de franche rigolade – dans un esprit iconoclaste réjouissant, comme si on était revenu à la grande époque de l’Echo des Savanes ou des débuts de Fluide Glacial : on passe sans coup férir de l’absurde au grand n’importe quoi, de la critique « sociale » à l’humour potache (avec ces dialogues inventifs et ces petits commentaires hilarants, comme « à côté » de l’histoire…). Ce qui n’empêche pas Bruneau de faire des détours vers l’émotion (cette très belle scène entre Carrie et son père !) ou même, osons le mot, vers les doutes existentiels, probablement d’ailleurs incontournables quand il s’agit d’affronter la Mort (ou la non-Mort !).
Et puis, comme Robbie est aussi un peu un « polar », l’enquête de nos deux héros leur permettra finalement de découvrir le « pot aux roses » : qui était Robbie quand il était encore vivant, comment est-il mort, et qui donc a « bénéficié » de son trépas…
Là où Robbie divisera sans doute, c’est au niveau de la mise en image de ce récit passionnant : à l’audace et l’imagination débridée du scénario, il a donc été décidé d’ajouter l’audace et l’imagination débridée d’une dessinatrice hors-normes : Emilie Gleason, récompensée à Angoulême il y a quatre ans (Prix Révélation du Festival), ne nous ménage pas, avec un dessin ne sacrifiant à aucune des règles de la BD « normale ». Pas de gaufrier et en général peu de structure des pages, des personnages changeant constamment de forme, de taille, d’apparence même, un gros fourre-tout dans chaque image sans respect des proportions, des perspectives, de la logique des mouvements, une accumulation, un entassement de personnages au milieu desquels on se perd… Robbie a une forme aussi spectaculaire que déroutante… même si, et c’est heureux, le lecteur prend peu à peu ses marques au fil des pages.
Reste que, pour admirablement libre qu’elle soit, cette mise en image s’avère régulièrement gênante pour la bonne compréhension d’un récit déjà sinueux. Et que l’on peut se demander si ajouter à la fantaisie délirante du scénario la fantaisie délirante du graphisme ne crée pas un effet de « trop » ?
On vous en laissera juges…