Lloyd Cole au Trianon (Paris) le samedi 4 novembre
20h : Tout le monde s’attend à un set solo, et c’est en effet seul avec sa guitare acoustique que Lloyd débarque, très classe, tout de blanc vêtu, sobre, sympathique et drôle comme toujours (qui plus est, faisant l’effort de parler la plupart du temps en français) : il attaque par Don’t Look Back, extrait de son premier album solo, ce qui ne manque pas d’ironie, puisque c’est bien de regarder en arrière dont il va s’agir, ce soir. Mais, surprise, Lloyd va progressivement être rejoint sur scène par ses trois musiciens, dont une batteuse blonde et souriante, Signy Jacobsdottir. On n’est plus certain de ce que Lloyd entendait par « set acoustique », même si, en effet, en dépit du format « full band », les titres de cette première partie seront interprétés avec une certaine sobriété. La setlist de ces 45 premières minutes fait plutôt dans la nostalgie, avec une seule exception, l’interprétation de l’excellent On Pain, du dernier album. On notera un petit problème de micro au début du set, vite résolu, mais sinon, tout est absolument impeccable, on est dans la maîtrise totale, et rien ne viendra gâcher le plaisir de cette soirée offerte comme un cadeau rare à un Trianon rempli de fans passionnés. Lloyd n’est pas avare de petits commentaires sur ses chansons, comme lorsqu’il qualifie le magnifique 2 CV de chanson londonienne en introduisant Undressed comme une chanson new-yorkaise : à la fin de Undressed, il nous rassurera d’ailleurs en rappelant qu’il parlait de lui-même, nu, en 1989, pas aujourd’hui ! Le final de cette première partie (« On revient ensuite pour le vrai concert, et ça va secouer ! », nous promet-il) est le merveilleux Are You Ready To Be Heartbroken?, toujours aussi magique...
21h05 : on a donc attendu vingt minutes pour voir revenir les mêmes musiciens, avec une seule différence : Lloyd est maintenant à la basse, un instrument qui semble aujourd’hui être son favori, quand on voit le plaisir manifeste avec lequel il en joue. Evidemment, la sonorité générale du groupe change, d’autant que les claviers vont devenir plus prépondérants sur les morceaux récents, mais c’est finalement plus la volonté de jouer plus fort, plus « rock » qui rend les choses différentes, moins retenues, plus excitantes.
Le set de 1h15 inclura pas mal de chansons récentes, traduisant mieux la nouvelle orientation musicale de Lloyd, même si le seul – et fantastique – Wolves abordera franchement ses tentations « prog rock » actuelles. Inutile de dire que, pour nous, le très long Wolves sera le moment le plus fort de la soirée, en attendant l’inévitable paroxysme final de Forest Fire.
Tout au long du set, le travail de Neil Clark à la guitare électrique sera époustouflant, confirmant que ce guitariste discret n’a pas usurpé sa réputation. Les anecdotes de Lloyd continueront aussi à « humaniser » le concert, qui s’apparente plus à une soirée entre amis qu’à une représentation traditionnelle. C’est ainsi que Lloyd nous racontera les déboires de l’un de ses albums, descendu par Nick Kent dans les Inrocks (« on dirait du mauvais Duran Duran » aurait été le verdict de la revue…), ou, après le beau Myrtle and Rose, nous expliquera, pince-sans-rire : « C’est un titre que ma mère a aimé : il m'aura fallu 30 ans pour écrire une chanson qu'elle aime ! ».
A la fin, Forest Fire est sublime, avec ce solo de guitare colossal, et nous fait regretter que Lloyd ne nous ait pas offert la version longue de la chanson… Rappel de deux titres plus calmes pour terminer dans la douceur et se quitter gentiment : 2h10 de concert, il n’y a vraiment rien à redire en termes de générosité, Lloyd a fait le taff ce soir, et ce concert aura certainement été l’un des meilleures qu’il nous ait offerts depuis ses débuts, il y a cinquante ans déjà.