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Le journal de Pok
20 mai 2023

"Beau Is Afraid" d'Ari Aster : shizo-mère fellinienne

Beau is afraid affiche

Ari Aster est un grand cinéaste, un vrai auteur, et on le sait depuis son premier film, Hérédité, qui présentait quand même quelques défauts, mais surtout depuis son génial Midsommer. Le problème est, évidemment, qu'il le sait, et que, à la première occasion donnée, il pète les plombs et décide - à son âge et seulement à son troisième film - de faire son Huit et demi à lui, histoire de garantir d'ores et déjà sa place dans les livres d'histoire du cinéma. Remarquez qu'en faire trop et accepter de provoquer un rejet massif de la part d'une vaste majorité du public ne manque pas de panache, sans même parler de se griller définitivement vis à vis des investisseurs et donc d'hypothéquer son avenir de réalisateur... Respect, finalement !

Beau is Afraid traite deux sujets classiques mais forts, et excessivement cinématographiques, en les entremêlant assez audacieusement : la toxicité de l'amour maternel et la schizophrénie paranoïaque. Avec Joaquin Phoenix, soit le meilleur interprète actuel possible pour jouer, sans jamais en faire trop, sans jamais tomber dans les clichés, la maladie mentale...

Ce qui nous vaut une première partie sidérante, éprouvante, où l'on retrouve toutes les obsessions et le talent des deux premiers films d'Aster. Une représentation parfaitement conçue, écrite, mise en scène du chaos intérieur comme extérieur. C'est terrifiant et c'est une grosse, grosse claque.

S'ensuit malheureusement une seconde heure, à partir du moment où notre héros se perd dans les bois et le film dans des mises en abyme successives de la narration, vraiment lourdingue, et surtout ni intéressante ni vraiment pertinente par rapport au propos général. On souffre encore, mais pas pour les bonnes raisons, malheureusement...

Et puis il y a la dernière heure, celle qui évoque franchement les délires felliniens, justement, et où Aster se joue de manière HENAURME des stéréotypes habituels sur l'amour - haine entre parents et enfants. Difficile de ne pas s'amuser devant ce délire inventif souvent très drôle, qui a, malheureusement, le tort d'être également un peu trop long : le procès final du mauvais fils, s'il est d'une logique imparable, est assez redondant, et témoigne sans doute de la difficulté qu'a le démiurge d'abandonner sa création...

Ce qui nous laisse avec un léger goût de déception... et ce qui est quand même dommage quand on repense rétrospectivement à certains moments extraordinaires qu'on a vécus devant Beau is Afraid.

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