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Le journal de Pok
7 février 2023

"Mayday" de Jean-François Richet : les leçons de Carpenter…

Mayday affiche

Alors qu’Avatar 2 consacre le règne sans partage de James Cameron sur le cinéma (au moins en salle…) et que l’étonnant, et très réussi, Chat Potté 2 de chez Dreamworks fait de la résistance, un petit film de série B fleurant bon le baston décomplexé style années 80 a tenté de s’immiscer dans le box-office US… avec un succès modéré, mais qu’importe finalement ?

Car à l’affiche ce Mayday qui nous rappelle les vertus, bien oubliées par les faiseurs de films de super-héros, de la sobriété et de l’efficacité, on trouve deux noms qui vont attirer l’attention des cinéphiles : bien sûr, il y a d’abord celui de Gerard Butler, écossais bougon au charisme limité mais qui réussit à construire une carrière sympathique entre les marges du cinéma d’action de série Z (plutôt que B, d’ordinaire) et les doublures de films d’animation (la série Dragons, une réussite notable quand même) ; mais il y a aussi celui du frenchie Jean-François Richet, qui avait explosé en 1997 avec son fameux Ma 6-T va crack-er, et qui en bon fan de John Carpenter (soit la meilleure référence qui soit dans le genre) avait proposé un très acceptable remake de Assault on Precinct 13. Deux bonnes raisons d’aller investir une heure trois quart de son temps dans une salle (et puis ça change très agréablement des deux heures et demie minimum des films actuels !).

Mayday nous raconte l’atterrissage forcé d’un avion de lignes sur un îlot des Philippines, suite à son passage à travers un violent orage (imposé par la compagnie aérienne soucieuse d’économiser un peu de kérosène). Le crash lui-même, spectaculaire et impressionnant malgré le manque flagrant de budget, n’est que le point de départ de l’histoire puisque l’équipage, mené par le capitaine Torrance, et les passagers vont devoir survivre à un affrontement avec une bande de miliciens séparatistes avides de s’enrichir en négociant la libération d’otages !

Ce qui frappe, et séduit indubitablement, dans Mayday, c’est la sécheresse d’une narration qui se concentre sur l’essentiel, et réduit au minimum les dissertations habituelles : certes les thèmes inévitables du genre, soit la famille, l’histoire d’amour, l’amitié virile, sont présents, mais traités rapidement, en prenant en compte que le spectateur connaît déjà bien tout ça et n’a pas besoin qu’on le lui surligne au marqueur fluo.

Un peu comme chez Carpenter et ses positions anars, Richet préfère nettement épingler la radinerie et le manque de courage du « business », la paralysie des employés incapables de prendre une décision, et la lâcheté générale d’une humanité à la mentalité d’enfants gâtés, toujours prête à critiquer son prochain. Que de chemin faudra-t-il à Torrance pour passer des quolibets de ses passagers irrités à des applaudissements sincères ! Et c’est bien ce chemin que nous raconte Mayday, celui d’un homme qui fait tout simplement son boulot, aussi bien qu’il le peut : d’où le choix pertinent de Butler (et pas d’un clown comme Dwayne Johnson par exemple), qui, avec son allure de type ordinaire et sa résistance physique limitée aux coups qu’il encaisse, reste parfaitement crédible.

Autre aspect particulièrement « carpenterien » du film, l’alliance de Torrance avec Gaspare, un détenu criminel, sans que les questions morales aient besoin d’être posées, devant les nécessités de la survie collective : la « sortie » réservée par le scénario à ce personnage fait d’un seul bloc montre d’ailleurs où vont les sympathies de Richet et de ses scénaristes.

Finalement, Mayday bénéficie clairement de son économie de moyens qui lui permet de se concentrer sur l’essentiel, sur la violence, filmée ici « à la dure », c’est-à-dire sans ce voyeurisme répugnant qui dégouline de bien de films contemporains. Mais il en souffre un peu aussi, lorsque Richet choisit d’effectuer des ellipses surprenantes, coupant des scènes qui manquent quand même dans le déroulement de l’histoire, comme l’arrivée sur l’îlot de l’équipe de sauvetage, ou bien le parcours final de ces fameux 80 kms qui séparent les deux îlots. C’est un peu dommage, car cela prive Mayday d’un peu de crédibilité…

… Même si ça n’entache que peu notre plaisir, aussi basique soit-il, de nous retrouver au cinoche à éprouver des sentiments et des sensations simples devant une histoire bien racontée et bien filmée. Et sans « gras ».

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