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Le journal de Pok
19 janvier 2023

“Kaleidoscope” 'Eric Garcia : un programme mensonger et maladroit pour un mauvais démarrage de 2023

Kaleidoscope Poster

Première « grosse » série Netflix de 2023, Kaleidoscope aura séduit a priori les plus sceptiques grâce à son concept prometteur : voilà l’histoire de la préparation, du déroulement et des conséquences d’un casse « exceptionnel », qui nous est racontée en huit épisodes que nous pouvons choisir de regarder dans l’ordre que nous voulons. Chaque épisode est d’ailleurs non pas numéroté, mais identifié par une couleur, et le tout est sensé nous procurer une vision « kaléidoscopique » de toute l’affaire.

Le problème est que rien, ou presque, n’est vrai dans cet argument marketing. D’abord la technologie actuelle du streaming ne permet pas a priori à Netflix de garantir un visionnage aléatoire à chaque téléspectateur, qui est donc maître de son choix : celui-ci risque, s’il n’est pas prévenu, de faire l’erreur fatale de ne pas garder l’épisode Blanc en dernier, et donc de voir révélé avant la fin la seule chose réellement « surprenante » de toute l’histoire, l’identité du « traître » qui a noyauté l’équipe de cambrioleurs. Soyons objectif, le mieux est, comme pour n’importe quelle série, de visionner les épisodes dans l’ordre proposé par défaut sur la plateforme : Jaune / Vert / Bleu / Orange / Violet / Rouge / Rose et Blanc. Un ordre qui permet une découverte somme toute logique des mobiles de tous les protagonistes de Kaleidoscope, donc qui maximise le plaisir.

Et maximiser le plaisir est important, car la série a tellement de défauts rédhibitoires qu’on est régulièrement saisi par l’envie de laisser tomber l’affaire. Tout d’abord, le concept de kaléidoscope, c’est-à-dire d’un nombre de perspectives différentes sur l’histoire qui en changeraient la perception (différentes couleurs, différentes formes), ne correspond pas à ce qu’Eric Garcia et ses scénaristes nous offrent réellement : il ne s’agit ici que de fragments « dans le désordre » d’une chronologie qui s’étale d’une vingtaine d’années avant le cambriolage (l’épisode « Violet », avec un rajeunissement (digital ?) de Giancarlo Esposito qui fait grincer des dents) à quelques semaines ensuite (l’épisode « rose », qui clôt la chronologie, et qu’il faut donc en effet regarder en avant-dernier). Le dévoilement progressif de l’histoire complète revêt plutôt l’apparence d’une construction classique en flashbacks, et n’a donc rien de particulièrement original.

Le cambriolage lui-même a été imaginé sans aucun souci de vraisemblance, et s’avère loin des grandes réussites du genre : The Inside Man, modèle absolu, vient à l’esprit, mais on peut aussi comparer Kaleidoscope aux scénarios de Soderberg dans Ocean’s Eleven et surtout Logan Lucky…). A trop vouloir le rendre complexe, dépendant d’une technologie ultra-moderne, les scénaristes ont créé un vaste sentiment de wtf, et une succession de situations aberrantes qui coulent en grande partie d’épisode final, Blanc. Ce n’est malheureusement pas la seule invraisemblance de Kaleidoscope, qui est rempli, dans chaque épisode, de comportements absurdes des protagonistes, de coïncidences forcées et d’illogisme frôlant le ridicule.

Finalement, il n’y a guère que deux raisons de rester devant son écran pendant ces 8 épisodes : d’une part le jeu des toujours impeccables Giancarlo Esposito et Rufus Sewell (ce dernier un tantinet sous-exploité, si l’on repense à sa performance inoubliable dans le Maître du Haut Château), et d’autre, un certain nombre de scènes d’action ou de violence qui s’avèrent régulièrement surprenantes, voire parfois très intenses, ce qui n’est quand même pas si mal pour ce genre de spectacle populaire. Ces qualités indéniables sont malheureusement à minorer par le reste d’un casting peu convaincant (Jai Courtney alourdit encore un personnage absurde de truand violent et jaloux, Niousha Noor n’arrive jamais à avoir la moindre crédibilité en agent du FBI ex-addicte et complexée par ses origines iraniennes), et surtout par une mise en scène qui se veut trop souvent trop « intelligente » pour son propre bien : n’est pas Tarantino qui veut, on le sait, et depuis longtemps.

Bref, Kaleidoscope est un ratage mémorable, un de plus pour Netflix, qui commence mal une année 2023 qui est celle de tous les dangers pour le leadership de la plateforme, alors que la plupart de ses concurrents proposent désormais des programmes bien supérieurs.

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