Kuunatic à Supersonic Records (Paris) le jeudi 17 novembre
21h40 : le trio des Tokyoïtes de Kuunatic impressionne d'emblée avec ses tenues modernes mais rappelant les kimonos traditionnels, et avec les visages des trois musiciennes sur lesquels sont dessinées d'étranges arabesques. Avant même que la musique commence, le voyage est entamé. Claviers, basse et batterie, avec un soupçon de flûte par ci par là et quelques instruments qui ont l'air plus traditionnels et qu'on secoue de temps à autres, voilà la base sur laquelle Kuunatic construisent leur musique, et surtout posent leurs voix. Des voix majestueuses, imposantes, puissantes, qui sont la principale caractéristique du groupe.
Kuunatic nous offre une musique qui conjugue des pulsations primitives – la batterie de Yuko -, des sons atmosphériques produits par les claviers de Fumie Kikuchi, et une base rock créée par le jeu de basse de Shoko Yoshida : le résultat est qu’on est bien en peine de mettre une étiquette sur ce qu’on écoute, et qu’on peut trouver ça magique (c’est notre avis) ou ennuyeux (à l’arrière de la salle, ça bavarde sans vergogne, et sans guère de respect pour les musiciennes. Le groupe n'hésite pas à aller de temps à autre vers la dissonance, vers l'inconfort, voire à nous offrir quelques moments de chaos.
Shoko râpe son médiator sur ses cordes, recherchant des sons différents, inédits peut-être : elle ne sourit presque jamais, assumant totalement un personnage de teigne renfrognée qui complète parfaitement son jeu de basse. Toute la communication avec le public incombe à Fumie qui nous explique que Kuunatic est en tournée européenne et joue pour la seconde fois à Paris.
Les morceaux sont parfois planants, vont chercher régulièrement le genre de sonorités et de mélodies que l'on associée immédiatement en Occident avec le Japon ancien, tandis que la rythmique ancre le tout dans le rock contemporain. Il suffirait de fermer les yeux pour être emporté, mais on préfère les garder grandes ouverts pour jouir de ce spectacle de trois spectres rouges qui s'agitent pour nous.
La toute dernière partie du set de 50 minutes monte en puissance, mais peut-être pas assez pour satisfaire le public rock traditionnel. La salle réclame un rappel qui nous est accordé après un temps de réflexion. Même si le concert aura manqué de cette étincelle qui transforme une musique de qualité en vraie expérience émotionnelle ou esthétique, on suivra désormais nos trois séduisants yōkai…