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Le journal de Pok
29 octobre 2022

Crack Cloud au Trabendo (Paris) le jeudi 27 octobre

2022 10 27 Crack Cloud Trabendo (5)

21h25 :… et pour être sérieuses, d’une certaine manière, les choses vont l’être : Crack Cloud, ce sont pour cette tournée treize (13 !) personnes sur scène, dont un groupe de cinq chanteuses et chanteurs sur une estrade à notre gauche, et une harpiste sur une autre à droite. Ça en impose ! La batterie de Zach Choy est comme toujours placée au milieu de la scène et en avant, le frérot William portant désormais les cheveux orange est à côté, et le reste de la troupe s’organise autour.

Le long premier morceau joué, avec une mise en avant des voix, est ample, lyrique, et sonne presque… rock progressif, traduisant l’évolution musicale du groupe. Mais pas d’inquiétude, on bascule très rapidement dans la folie furieuse dont on sait Crack Cloud capables : sur scène, il y a des chants et des danses – qui peuvent évoquer le Arcade Fire exalté des tous débuts -, de la guitare punk (William Choy sera notre idole de la soirée), des rythmes épileptiques et décalés (entre Talking Heads et les débuts dissonants de XTC, quand Andy Partridge était encore très énervé, comme un fabuleux Drab Measure qu’on aurait toujours bien vu sur le White Music des Anglais, ou encore un Crackin Up superbement colérique), des dérapages absurdes dans le chaos, conduits en particulier par un Aleem Khan déchaîné depuis qu’il a abandonné son costard étriqué de DJ.

Et le set, qui dépassera une heure, va jouer sur cette alternance entre de longues plages où les percussions et les deux saxos nous entraînent dans des trips très free jazz, avant d’exploser soudain de manière incontrôlable, des passages vocaux posés et planants ou d'autres, très emphatiques (Post Truth, inévitablement), qui lorgnent vers le rock progressif années 70, et puis ces brèves déflagrations punks où tout le monde devient littéralement hystérique, sur scène comme dans la salle... Car le public, en grande partie féminin, est à fond : chantant les paroles des hymnes du groupe, et sautant dans tous les sens comme un sac de haricots mexicains, les filles nous aurons plusieurs fois sérieusement mis en danger au premier rang ! Comme ce fut le cas à la Maro il y a quelque jour avec Bass Drum of Death, mais en version nettement moins mâle cette fois, la frénésie punk gagne progressivement toute la salle, et croyez-nous, même si c’était physiquement épuisant (on comptera ses bleus plus tard, à la sortie), c’était très beau et très émouvant.

2022 10 27 Crack Cloud Trabendo (21)

Rappelons que Crack Cloud est une association, formée en 2015, dont le but est de « déconstruire les stigmates sociaux » (entendez, aider les addicts en phase de réintégration dans la société, mais aussi les personnes exclues du fait de troubles mentaux) « à travers un contexte de créativité » (en faisant de la musique, des vidéos, des arts graphiques). Et cette approche explique largement le mélange décoiffant et passionnant de chaos et de création (« in the backyard », justement) que produit le collectif. Mais d’un autre côté, c’est sans doute inévitable et ce n’est pas une mauvaise chose du tout, le groupe lui-même s’est quand même « professionnalisé ». Au milieu du set, Zach, rompant avec son attitude habituelle de jeune punk arrogant, prend la parole avec une émotion inattendue, pour nous parler de sa surprise et son bonheur d’en être là en 2022, qui plus est avec ce groupe de choristes qui les accompagne… matérialisant ce qui était au départ un projet social marginal. C’est un très beau moment, qui confère à la soirée un sens particulier…

Contre toute attente, nous aurons droit à un rappel, grand moment improbable de joie générale, de bordel absolu, où tout le monde braille en chœur, sur scène comme dans la salle. Aleem Khan attise le feu avec son porte-voix, et à un moment-clé où tout bascule, nous reviennent des flashbacks inattendus de concerts des Béruriers Noirs. Quand nous sortons de cette heure de « libération créative », assez « déconstruits » physiquement et portant quelques « stigmates » de la soirée, nous croisons un ami resté dehors – le boulot, c’est boulot ! – qui nous demande : « "c'était quoi, cette musique ? On aurait cru écouter un groupe alternatif français des années 80 ! ». Eh non, c’est juste un groupe alternatif canadien des années 20, mais c’est bel et bien le même esprit. Et ça décoiffe tout autant !

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