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Le journal de Pok
12 juin 2022

"The Unstable Boys" de Nick Kent : it’s only rock’n’roll, and I hate it !

The-Unstable-Boys

Contrairement à ce que tout le monde semble vouloir croire, et à ce que les publicitaires tentent nous faire gober, les années 70 n'ont rien eu de bien brillant et les fameuses "rock stars" de l'époque étaient en général un ramassis d'idiots camés au comportement répugnant, qui n'auraient plus guère droit de cité à notre époque. Si vous ne nous croyez pas, lisez ou relisez la prose de Nick Kent, journaliste musical qui a vécu lui-même dans l'œil du cyclone – au point de sombrer un temps dans une sévère addiction aux drogues dures : NIck a chroniqué dans ses articles toutes ces exactions en temps réel, et est revenu sur ce torrent de dépravation, de boue et d'imbécilité crasse dans sa drôle d'autobiographie Apathy for the Devil, une lecture recommandée pour tous ceux qui se risqueraient de se sentir un jour nostalgiques des seventies…

Mais Nick Kent, l'une des plumes les plus acérées, drôles mais aussi honnêtes de sa génération, qui vit en France depuis les années 90, a maintenant entrepris de régler aussi leur compte aux sacro saintes sixties dans son premier roman, The Unstable Boys, et ça fait mal ! The Unstable Boys est le nom d’un groupe (imaginaire, mais tellement réel…) qui fait brièvement concurrence aux Stones avant de rapidement disparaître par la combinaison d'une malchance terrible et de la personnalité toxique de son leader, The Boy. Le livre de Kent se veut la chronique de l'éternel retour de ce leader, à la soixantaine bien tassée, qui a survécu grâce à la naïveté de ses fans et qui voit miroiter la promesse de toucher enfin le jackpot financier : un auteur populaire de romans policiers s’est mis en tête d’écrire sa biographie par alors que même sa musique connaît un regain de popularité grâce à son utilisation dans des publicités. On s’en doute, rien ne se passera comme prévu, et nul n’échappera à la catastrophe prévisible…

The Unstable Boys, écrit en anglais et très bien traduit par la compagne de Kent, la journaliste Laurence Romance, désoriente parfois son lecteur de par sa structure « chorale », avec une multitude de personne dont aucun ne peut être qualifié vraiment de « principal », et par la manière nonchalante dont il se joue du passage des années : Kent n'hésite jamais à sacrifier l'efficacité narrative de son livre pour pouvoir y insérer son point de vue (ses souvenirs, sans doute…), sa perspective sur le business du rRock, sur l'irresponsabilité générale de ses acteurs, et sur l'aveuglement qui nous saisit à peu près tous, nous les fans, quand il s'agit de revivre les sensations de notre jeunesse. Certains chapitres, comme ceux relatifs à l'existence de Ral Coombes, principal compositeur du groupe, à Amsterdam, s'avèrent tantôt artificiels, tantôt un tantinet laborieux, mais tout le reste est beaucoup trop délicieux, trop amusant et surtout trop intelligent pour qu'on en veuille à Nick de ne pas être un auteur standard de best selliers : non, Nick Kent reste une sorte d'éternel amateur, formidablement doué pour raconter son siècle.

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