Parquet Courts au Trianon (Paris) le samedi 21 mai
21h00 : le matériel de Parquet Courts est installé complètement en retrait, au fond de la scène, ce qui traduit sans doute une certaine prudence, bien US, en ces temps de pandémie, mais nous garantit au moins de pouvoir assister au concert du premier rang sans avoir à nous tordre le cou.
A la différence d’il y a trois ans, et c’est très appréciable, le set débute avec une intensité folle, et l’ami (enfin, façon de parler, on sait que l’homme n’est pas des plus sympathiques avec le public, à la différence d’Austin et de Sean…) Andrew Savage est déchaîné depuis les premières secondes : il faut dire qu’on démarre sur Application/Apparatus, sommet sonique du dernier album. Le déluge sonique à la guitare évoque d’ailleurs une filiation qui a toujours été sous-entendue chez Parquet Courts, celle avec Sonic Youth. Paradoxalement, l’enchaînement avec la belle chanson Human Performance se fait sans un pli, parce que l’interprétation que Parquet Courts en livre est tout simplement furieuse : il faut rappeler à ceux qui ne connaîtraient que les albums que la manière dont le groupe fait vivre ses chansons sur scène est souvent différente de la manière dont elles sonnent sur les disques. Et la formidable Dust, qui fait danser et hurler le public maintenant en transe, nous laisse penser qu’on va assister au concert idéal de Parquet Courts : inspiré, sauvage, incandescent…
Cela fait près de 25 minutes qu’on est tous à fond, quand le groupe appuie sur la touche « pause » : Sean Yeaton fait le clown comme d’habitude, Austin Brown commence à déblatérer dans son micro plein de trucs sympas et drôles – dont on n’entend pas la moitié, vu qu’il parle trop bas… et le set bascule alors dans sa partie électro-danse. Les bip-bips de Marathon of Anger marquent le début d’une longue recherche, plutôt tranquille et souriante, d’une ambiance hédoniste de dance floor : Parquet Courts n’est plus alors le même groupe. Ce virage vers autre chose est d’ailleurs ce que nous avons apprécié sur Sympathy For Life, mais il nous faut bien admettre que, sur scène, on préfère quand même la rudesse punk des débuts. Sur Just Shadows, Andrew prend de très beaux solos, et du coup, on se demande s’il n’évolue pas un peu comme Lou Reed dans la seconde partie de sa carrière, vers une musique où une certaine virtuosité à la guitare s’imposerait… Plant Life, avec son ambiance « Talking Heads – Remain in Life » nous embarque à nouveau dans un trip très décontracté, où la basse puissante de Sean fournit le meilleur ancrage à notre patience.
La déflagration punk de Homo Sapien fait un bien fou et le public s’embrase à nouveau : au premier rang, nos dos souffrent, frappés par les petits poings et les coudes pointus de jeunes groupies déchaînées, et on se dit d’un coup que si ce morceau est aussi accrocheur, c’est parce qu’il a un peu du Kick Out the Jams du MC5. Stoned and Starving nous fait le coup de la nostalgie, celui qui marche toujours, la nostalgie des débuts du groupe, il y a dix ans déjà (cris d’extase derrière nous !)… mais le set se terminera plus calmement sur les longs solos de guitare de Pulcinella.
Comme d’habitude, le groupe n’offrira pas de rappel, mais on se consolera en remarquant que ce set d’une heure trente minutes est bien plus long que celui de 2016. Et qu’il a été visible tout au long de la soirée que les New-Yorkais étaient heureux d’être là, avec nous, à Paris. De notre côté, les avis sont partagés, entre ceux qui sont très enthousiastes par rapport à l’intensité de certains passages, et d’autres qui ont pu s’ennuyer quand le groupe se plaisait à divaguer longuement.
Espérons en tous cas que nous n’aurons pas à attendre plus de cinq ans à nouveau pour revoir Parquet Courts sur une scène parisienne !