"Un Autre Monde" de Stéphane Brizé : another world
Dernier film de la trilogie de l'équipe Brizé / Gorce / Lindon sur l'horreur économique, "Un Autre Monde" complète parfaitement l'analyse dramatique de la situation sociale entamée avec "la Loi du Marché" et "En guerre", tout en s'avérant le plus faible des trois films.
Rien à redire de l'interprétation parfaite de Vincent Lindon, mais aussi de tout le cast (même si Kimberlain est un peu cantonnée à un rôle larmoyant). Rien à critiquer non plus au niveau de la mise en scène, claire, nette et juste à la bonne distance des personnages.
C'est plutôt au niveau du scénario que "Un Autre Monde" cloche : d'abord parce que la description du processus de décision et de gestion de crise de l'entreprise est largement irréaliste et décrédibilise les différents retournements de situation chargés de faire monter la tension (sans en faire autant et en ne racontant que la triste réalité de 80% des entreprises soumises à la pression des actionnaires, le film aurait débouché sur le même constat terrible...).
Ensuite, en accumulant les malheurs sur son personnage, en particulier à travers de la situation bouleversante du fils accablé par une maladie mentale, le scénario détourne finalement l'attention du sujet principal, pourtant suffisamment fort pour ne pas avoir ainsi besoin de "béquilles" narratives...
Finalement, en chargeant assez inutilement d'abjection les deux personnages clé de la DG France et du patron américain, Brizé en fait trop, et il aurait sans doute été plus efficace de montrer l'impuissance de personnes plus "humaines" entraînées à prendre des décisions inhumaines, que de donner ainsi un visage à l'horreur du capitalisme financier.