"Bonding - Saison 1" de Rightor Doyle : maîtresse...
On se souviendra peut-être que Barbet Schroeder avait réalisé dans les années 70 "Maîtresse*", film sulfureux sur les pratiques sado-masochistes ritualisées, qui voyait un jeune homme extérieur à ce monde (Depardieu) devenir l'assistant d'une "maîtresse" (Bulle Ogier) et entrer peu à peu dans son intimité. Schroeder avait inséré dans son film des images réalistes de pratiques extrêmes, qui avaient choqué à l'époque le public "non averti"... Il est amusant de constater combien "Bonding", la série US de Rightor Doyle part du même principe (l'initiation d'un jeune homme à un monde caché, à la fois attirant, effrayant et vaguement révoltant) et s'essaie à un parcours similaire, qui est de montrer que, derrière l'étrangeté, ce sont toujours les mêmes tares et les mêmes souffrances que l'on retrouve. Avec deux différences de taille, qui sont que le registre de la série est foncièrement comique, voire petit à petit celui de la rom com la plus convenue, et surtout que le sado masochisme est principalement réduit ici à des humiliations morales, voire même à des pantalonnades vaguement grotesques, et que la souffrance physique est largement évacuée, voire ignorée.
Alors oui, la première saison de "Bonding" est drôle, voire même réjouissante. Oui, elle va titiller les frontières de la (large) tolérance actuelle vis à vis de l'homosexualité masculine en particulier - qui reste légèrement caricaturale, mais est au moins décrite avec empathie, voire avec chaleur. Oui, elle pointe du doigt l'incompréhension dont sont encore victimes les adeptes du bondage / SM. Oui, elle assume une certaine déviance que nous avons probablement tous, plus ou moins cachée, en nous-mêmes. Et pour cela, elle est un spectacle très réjouissant, d'autant qu'elle est portée par d'excellents acteurs, qui dégagent vraiment quelque chose et qu'on se prend très vite à aimer : Zoe Levin est très jolie en clone de Winona Ryder, mais ce sont surtout tous les mâles du casting qui font le show, s'appuyant sur des personnages complexes et paradoxaux comme on les aime, avec un premier lieu le formidable Brendan Scannell, véritable révélation de la série.
Mais on ne peut par contre que déplorer que Doyle n'ait pas le courage d'aller se frotter plus franchement aux zones plus obscures de l'âme humaine, et passe finalement un peu à côté de son sujet.