Promenade sur les traces d'un géant, Neil Young : "Tuscaloosa" (2019)
"Tuscaloosa" pose problème. Ou peut-être au contraire, n'en pose aucun, ce qui revient au même. Tous ceux qui aiment un peu le Loner, même quand il raconte des conneries (désavouant le fabuleux "Time Fades Away" par exemple...), connaissent l'histoire de cette tournée, commencée dans la bonne humeur et le professionnalisme (enfin, entendons-nous bien, c'était quand même les années 70...) et qui a basculé dans une sorte d'horreur : conflits entre les musiciens pour de minables affaires de gros sous, et Neil qui part complètement en vrille et se met à chanter de plus en plus faux et jouer de plus en plus "mal". C'est le début de la fameuse et fabuleuse "ditch" period de Neil Young,qui le verra atteindre les sommets (de la désolation, mais des sommets quand même...). Donc "Tuscaloosa", c'est Neil Young avant la crise : alors qu'il connaît enfin un succès commercial énorme, il nous livre avec un groupe de "bons élèves" des interprétations polies, pas très inspirées, des chansons, certes gigantesques, de "Harvest", et la présentation de nouveaux morceaux qui sonnent plutôt country dans des versions assez propres, et qui deviendront des cauchemars malaisants quand ils réapparaîtront plus tard, sur "Time Fades Away" et "Tonight's the Night".
Entre le bouleversant tremblement émotionnel du "Live At Massey Hall" et la déliquescence agressive de "Time Fades Away", il y a donc désormais ce "Tuscaloosa", qui a surtout une valeur historique (ce qui n'est pas si mal pour alimenter les exégèses...).
PS : Comme nous ne voulons surtout pas être taxés de mauvaise foi, admettons que l'introduction sur le rare "Here We are in the Years" et la version électrique de "New Mama" peuvent néanmoins justifier de défendre cet album.