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Le journal de Pok
27 août 2019

The Cure à Rock en Seine le vendredi 23 août

2019 08 23 The Cure RES J1 Parc St Cloud (1)

21h00 : les clochettes de Plainsong annoncent l'arrivée de The Cure, apportant enfin la délivrance à la frustration perceptible dans la foule massée devant la grande scène. Il est évidemment rare que Rock en Seine soit le théâtre d'une telle vénération populaire - le concours de t-shirts vintage de The Cure en témoigne -, et le niveau d'attente du public est stratosphérique. Celui de Robert également, allons-nous découvrir : tandis que le groupe a déjà attaqué le morceau, Robert prend son temps, nous observe depuis l'obscurité, arborant un grand sourire mais les yeux remplis d'inquiétude… Qu'attend-il ? Qu'espère-t-il de ce public français qui l'a toujours vénéré ? Plainsong donne le ton : mélancolie, angoisse, vertige existentiel, le Cure éternel. La voix de Robert, d'abord incertaine, se positionne comme toujours au point exact de convergence entre douleur et innocence. Love Song, bouleversant, presque sublime, confirme que le groupe de 2019 n'est pas un cover band de luxe qui joue les grands succès d'un Cure qui n'existerait plus : Intensité, intégrité, intransigeance, tout y est ce soir !

L'incroyable version de Burn qui suit confirme l'excellence de la formation autour de Robert : l'éternel ami bondissant Simon Gallup à la basse (qui peut faire le show à lui tout seul avec son improbable coupe de douilles et son jean en pièces), Reeves Gabrels dont la guitare volcanique s'est intégrée idéalement dans le son de The Cure, Jason Cooper qui m’a paru ce soir préférer swinguer plutôt que marteler ses fûts (…à moins qu’il ne se soit agi là de l’un des effets positifs d’un son particulièrement clair et équilibré !), ce qui fait régulièrement la différence par rapport à des formations antérieures, et Roger O’Donnell (qui faisait déjà partie du groupe en 1987, rappelons-le, et est revenu il y a déjà presque une décennie…) qui s'amuse comme un petit fou derrière ses claviers. Surtout, surtout, on réalise que ces gens-là, alors qu'ils jouent l'une des musiques les plus tristes qui soient, ont un vrai plaisir à jouer ensemble, et ça, ça change tout.

2019 08 23 The Cure RES J1 Parc St Cloud (5)

Robert enchaîne une version très dure de Fascination Street, mais, paradoxalement, semble enfin (après une petite heure de set, mais on a envie de dire après quarante ans de carrière…) se lâcher, plaisanter, rire même ! On n’en croit pas nos yeux ! Never Enough, avec la participation active du public aux chœurs est sans doute LE moment où l’euphorie prend la main sur la soirée, et la transforme en une magnifique oasis de bonheur partagé. Ce soir, le public, souvent venu de loin et qui n’a rien à voir avec celui habituel de ce festival souvent un peu trop élégant et distant, est parfait, portant attention à chacun des morceaux, chantant quasiment toutes les chansons. Le groupe est, on l’a déjà dit, parfait, s’appropriant les morceaux et les portant parfois dans des directions inattendues (The Forest, un peu plus tard, semblera presque tout neuf !). La mise en scène lumineuse et les projections en fond de scène sont régulièrement étourdissantes de splendeur, et les conditions pratiques du set parfaites aussi, avec une douce température nocturne créant une bienheureuse atmosphère de vacances. Que demander de plus ? Un Robert Smith “in love with us” ? Eh bien, nous allons l’avoir aussi…

From the Edge of the Deep Green Sea est un autre passage incroyablement intense d'une setlist qui tourne beaucoup autour de l’album “Disintegration” (sept morceaux en seront joués), mais n’ignorera pas des titres moins connus du plantureux répertoire du groupe. Play for Today marque le retour en force du public, qui impose ses chœurs sur un morceau qui constituera l’un des plus grands crowd-pleasers de la setlist de ce soir ! La dernière ligne droite mise de nouveau sur les ambiances extrêmes, durcies par un groupe qui ne fait pas de concessions, culminant sur une très belle version du formidable Shake Dog Shake, avant la lente redescente vers les enfers de la dépression de Disintegration.

2019 08 23 The Cure RES J1 Parc St Cloud (20)

Les enfers de la dépression ? Pas sur scène en tout cas, Robert Smith étant de plus en plus hilare et expansif, s’épanchant au micro sur son français qui n’est plus de ce qu’il était, et faisant des blaques : « si vous ne comprenez pas ce que je viens de dire, qui était du français, c’est que vous n’êtes pas Français ! ». Tu parles, Charles !

Retour ensuite pour un rappel de 30 minutes entièrement consacré à des tubes pop, offerts dans des versions à la fois rock et fantaisistes, et se terminant sur le rituel Boys Don’t Cry. Honnêtement, rien de mémorable musicalement dans cette toute dernière partie d’un set de deux heures vingt au total, donc un peu court par rapport aux standards du groupe, mais l’intérêt de cette dernière partie était ailleurs : dans l’attitude de Robert Smith, qui est venu à plusieurs reprises quasiment au contact de son public, sur l’avancée de la scène et sur les estrades latérales. L’avoir – pour la première fois après tant de shows au fil des années où il semblait surtout retranché dans sa douleur et sa tristesse – comme ça à quelques mètres devant nous, grimaçant des sourires timides en regardant enfin en face l’amour que son public lui offre, a été une expérience incroyable… Et, si l’on nous permet une pointe d’irrespect, légèrement traumatisante : car ce gros nounours, aux yeux embués par l’émotion, avait aussi conservé – heureusement – quelque chose d’effrayant, comme l’un de ces monstres trop humains sortis de l’imaginaire de Tim Burton.

Conclusion de la bouche de Robert Smith lui-même après s’être frotté ainsi à son public : « C’était un cauchemar, mais je suis incroyablement heureux ! ».

Voilà, c’était VENDREDI, et nous étions à nouveau AMOUREUX. 

 

 

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