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Le journal de Pok
3 juillet 2019

"The Perfection" de Richard Shepard : la vengeance d'une femme

The Perfection affiche

Osons nous avouer que, nous aussi, derrière nos prétentions vaguement « intellos », nous adorons le cinéma outrancier, grand guignol même, quand il sait appuyer franchement sur tous les boutons du plaisir ouvertement pervers et délicieusement honteux de notre cinéphilie un tantinet déviante ? Oserions-nous déclarer que nous avons trouvé que "The Perfection" était un objet parfaitement délicieux : un film que l’on peut considérer objectivement comme un navet ridicule, mais tout aussi objectivement comme un grand délire conceptuel qui ose tout et réussit au final pas mal de choses que l’on aurait jugées impossibles.

D’abord, il y a ce truc malin d’une bande annonce et d’un résumé totalement mensongers, qui font croire à un remake putassier du déjà bien dégueulasse "Black Swan" (un film que nous, nous méprisons largement…), alors que "The Perfection" va partir au moins deux fois dans des directions complètement différentes, et assez surprenantes. Ensuite, il y a deux jeunes actrices - Alison Williams et Logan Browning - magistrales de bout en bout, dont l’alchimie est parfaite (ce qui a sans doute suggéré aux auteurs le dérapage vers une passion lesbienne très tendance…), et qui portent le film sur leurs belles épaules jusqu’au bout, jusqu’à cette scène finale littéralement hallucinante, qui fera hurler certains au chef d’œuvre alors que d’autres s’arracheront les cheveux de rage et de dégoût. Il y a aussi une image très classe, une mise en scène souvent inventive. Il y a un long détour par la Chine – le luxe de Shangai comme le dénuement de la campagne profonde – qui a le mérite de fournir des décors « frais », qui nous changent de la routine de 90% des thrillers horrifiques qu’on nous sert d’habitude. Si nous osions, nous dirions même qu’il y a un petit quelque chose de « coréen » dans ce cinéma, qui passe allègrement d’un genre à l’autre, et n’a aucune peur de porter certaines scènes jusqu’à un paroxysme assez insensé : ainsi, la longue et éprouvante scène du voyage en bus est une vraie merveille de tension, une superbe épreuve pour nos nerfs, qui sauve à elle seule tout le film, malgré le reste…

… car le reste, c’est une liste assez longue de trucs pas très brillants qui nous privent du petit chef d’œuvre qu’aurait pu être "The Perfection" : l’invraisemblance assez lourde de toute l’histoire, malgré les passages en force assurés par la mise en scène et l’interprétation inspirée ; l’idée bien pourrie des « rembobinages » du film pour offrir une perspective différente sur le récit, un peu comme si Shepard voulait faire son petit Tarantino (le chapitrage étant également un symptôme de cette maladie…) ; une indéniable facilité avec laquelle le scénario résout des problèmes pratiques quand même assez épineux, etc. etc. Mais bon, nous allons répondre à la question posée en ouverture de cette critique, et admettre que, oui, nous avons passé une heure et demie de pur plaisir, et que, pire, encore, ce film et certaines de ses images, de ses idées, nous ont hantés ensuite durant une bonne journée.

Alors, que demander de plus ? Du bon goût ? De la subtilité ? Ce ne sera pas pour cette fois.

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