"L'Adieu à la Nuit" d'André Téchiné : les nouveaux monstres
C'est certainement l'un des pires cauchemars pour des parents que de voir leur enfant devenir un criminel. En ce début maudit de 21ème siècle, nous avons droit à une variante particulièrement perverse de ce cauchemar, la chute de nos enfants dans l'islam, puis leur radicalisation dans le terrorisme. Cette nouvelle horreur suffocante, à la fois incompréhensible - on invoquera, comme le fait Téchiné dans cet "Adieu à la Nuit" des circonstances familiales dramatiques, ou encore le manque d'aspirations proposées par une société hyper matérialiste - et terriblement stupide. Deneuve est évidemment formidable comme toujours chez Téchiné, et exprime avec la subtilité qu'on lui connaît la douleur et la révolte devant un (petit) fils "sous influence" décidé à rejoindre l'EI en Syrie. Elle est le meilleur d'un film qui échoue régulièrement à nous embarquer dans le drame qui se joue, assez platement, devant nous : peut-être parce que la greffe d'une problématique aussi contemporaine sur l'univers du cinéaste (le Sud de la France, la campagne, les conflits familiaux, l'homosexualité - ici évidemment refoulée) a du mal à prendre... Peut-être aussi parce que le cinéaste, fidèle à son principe d'empathie avec tous ses personnages, traque assez artificiellement des preuves d'humanité chez ces "nouveaux monstres" qu'il ne veut surtout pas ostraciser. Le résultat est un compromis plutôt mou, et tiède, qui tient à distance aussi bien l'horreur vécue par les parents que la révolte qui bouillonne confusément chez les "radicalisés". Bref, le sujet est important, l'approche de Téchiné honorable, mais le résultat est bien en dessous de nos attentes.