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Le journal de Pok
27 avril 2018

Réécoutons les classiques du Rock : "Avalon" de Roxy Music (1982)

AvalonIl est une idée reçue particulièrement absurde qui persiste encore aujourd'hui, c'est que le Rock serait mort dans les années 80, noyé dans la soupe synthétique et fade qui trustait les hit parades de l'époque. Il suffit juste de dresser une courte liste de quelques chefs d'oeuvre reconnus des eighties pour réaliser que la rugosité, la pugnacité, l'intransigeance fleurirent au contraire comme jamais : "Closer", "The Queen is Dead", "Psychocandy". "Pornography", "Violent Femmes", "Surfer Rosa", etc.

Et puis, à l'inverse, pourquoi ne pas admettre aussi que la sophistication glacée, le raffinement exagéré, la pose "arty" outrancière, les beaux costards bien taillés hors de prix et les coupes de cheveux impeccablement démodées ont pu aussi résulter en (ou bien cacher ?) des albums mémorables, peut-être éternels : alors qu'à l'époque de sa sortie, j'avais ragé contre ce que je considérais comme l'ultime trahison des jeunes et brillantes années de la "roxy music" (rock + sexy, comme nous l'avions baptisée à la sortie du premier album...), "Avalon" a tout désormais de l'enchantement empoisonné. Derrière une curieuse pochette "mi-Heroic Fantasy, mi pubarde", alors qu'une autre belle jeune femme dénudée aurait si bien fait l'affaire, se dissimulent quarante minutes de sensualité morbide, de langueurs infernales, d'élans romantiques brisés, de splendeur asphyxiante : même si l'album pique du nez dans sa toute dernière partie et évite de peu le chef d'oeuvre absolu, quelle démonstration de maîtrise mélodique et de toute-puissance esthétique... vaguement perverses !

Entre le pur fantasme d'une imagerie sexuelle langoureuse mais dévorante, et l'élégance infinie de la dissolution inévitable des illusions amoureuses, le Roxy Music en phase terminale de Bryan Ferry ne tranche pas : ce sera désir et plaisir, bonheur et déception, passion et infidélité. Le tout et le rien, le zéro et l'infini. L'extase et la désillusion, donc. Avalon est un mythe mais on peut y vivre heureux (?) quelques brefs instants... et en souffrir ensuite éternellement.

"Avalon", l'album, est un cadeau suave un peu écoeurant que les eighties nous ont fait, mais aussi une blessure dont la vague douleur ne nous quittera jamais complètement. Heureusement : more than this, et nous étions définitivement damnés.

PS : On oubliera volontiers que sur ses brillantes prémisses, Ferry construira une carrière solo décevante, usant jusqu'à la corde les intuitions magnifiques de cet album.

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