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Le journal de Pok
26 mars 2018

Editors à l'Olympia le vendredi 23 mars

2018 03 23 Editors Olympia (55)21h00 : la belle salle de l’Olympia est pleine à craquer et bruisse d’un indiscutable sentiment d’excitation générale. Même si le public n’est pas tout jeune, je dois admettre que Editors a atteint un certain niveau de popularité, et que sa métamorphose électronique lui a été bénéfique sur ce point-là. Le rideau se lève sur une scène décorée de manière assez impressionnante par une accumulation de formes métalliques vaguement menaçantes. Editors reste basé sur son trio initial, le massif Russell Leech à la basse sur la droite, le redoutable Edward Lay derrière ses fûts, constituant à eux deux une remarquable section rythmique (même si pas mal d’électronique y est ajoutée…), et le spectaculaire Tom Smith, qui me paraît d’entrée bien allumé ce soir. L’irremplaçable Chris Urbanowicz a donc été remplacé depuis cinq ans par la paire Justin Lockey, guitariste transparent et quasi inaudible sur scène (alors qu’il est placé juste en face de moi !) et Elliott Williams aux claviers, invisible d’où je suis… Les lumières sont basses, principalement dans les bleus et les rouges, un cauchemar pour les photos, mais une ambiance spectaculaire garantie !

On attaque avec le stupéfiant (au moins sur l’album…) Hallelujah (So Low), du genre Muse rencontre Peter Gabriel, avec ses attaques soniques dantesques, malheureusement réduites à leur plus simple expression ce soir du fait d’une sono déficiente – ça restera le cas tout le set, ce son vraiment trop peu puissant pour la musique de Editors – et une balance mal faite (défaut rapidement réglé, heureusement). Cette petite frustration digérée, Tom attaque… un titre peu convaincant du faiblard "The Weight of Your Love”, et je me rappelle d’un coup pourquoi j’avais alors abandonné le groupe : cette emphase romantoc à la Simple Minds, même si ça plaît encore à une bonne partie du public, c’est vraiment déplacé à notre époque ! Je serre des dents, me disant que cette soirée a peut-être bien été une erreur…

… jusqu’à Violence, magistral, qui s’allonge dans une transe électronique que ne renierait pas New Order, et qui me rassure : le nouvel album n’est pas un leurre, il y a quelque chose qui se passe à nouveau chez Editors. La température dans la salle monte d’un cran, les bras commencent à se lever – toujours un bon signe, ça, les bras qui se lève ! Le set bifurque alors dans une exploration en quatre titres des deux premiers glorieux albums, et il faut bien admettre que, même si nous sommes tous heureux d’entendre à nouveau les mélodies de Munich ou An End has a Start, il ne reste plus grand-chose de la force et de l’urgence sublime sans la guitare d’Urbanowicz et avec la manière histrionique dont Tom les chante : un non-événement, finalement, et cet Editors-là est bel et bien mort et enterré !

2018 03 23 Editors Olympia (162)Curieusement, car ce n’est pas un titre forcément essentiel dans la discographie de Editors, ce sera In this Light… avec ses synthés sépulcraux qui remettront le concert sur la bonne voie, confirmant que le présent d’Editors est bel et bien électronique, au grand dam de nos cœurs de rockers passionnés pour les guitares bruyantes. Tom Smith est complètement dans l’outrance désormais, dans une théâtralité permanente, qu’on peut juger un tantinet forcée, mais qui a le mérite d’appuyer sur tous les boutons qu’il faut quand il s’agit d’exciter les spectateurs ! Finalement, Tom a gardé ces gestes et ces poses convulsives qui nous rappelaient feu Ian Curtis, mais il a maintenant la présence scénique d’un Peter Gabriel post-Genesis : une référence étonnante, mais qui m’a sauté aux yeux. Et puis c’est ce qui sera pour moi le sommet musical de la soirée, une version stupéfiante de Nothingness, bien supérieure cette fois à celle de l’album. La voix de Tom a désormais des accents soul, et la conjugaison de cette exacerbation des sentiments avec l’orchestration électronique est absolument parfaite : « We wait in line for nothingness / this angel needs some tenderness, tenderness » sera sans doute la phrase de la soirée, celle qui me restera en mémoire toute la nuit. Marrant, il y a à ce moment-là sur scène quelque chose de l’intensité émotionnelle d’un Future Islands… ce qui montre combien Editors a évolué par rapport à ses débuts post punks.

The Racing Rats, insignifiant malgré la ferveur du public, confirme encore que Editors a bel et bien passé son chemin, et le set principal se termine sur un Ocean of Light vraiment trop bas du front, trop facile, même si je dois dire que toute l’Olympia est aux anges, et que Editors a complètement gagné les cœurs ce soir. Y compris le mien, en fait.

Un rappel copieux, qui ne commence pas très bien, tant la version solo (à la guitare acoustique) du superbe No Sound but the Wind est gâchée par l’outrance avec laquelle Tom chante : ce cirque théâtral n’est vraiment pas nécessaire quand on a une si belle chanson ! Heureusement, les quatre derniers titres de la soirée seront absolument parfaits : Cold est un morceau sublime, certainement l’un des meilleurs de toute la discographie de Editors, Magazine transcende complètement, grâce à l’enthousiasme des fans (même le balcon de l’Olympia est debout maintenant), son statut de single assez mal choisi, et… Papillon, bien entendu, vient nous inonder de joie, nous mettre même les larmes aux yeux. La nuit se terminera par un Marching Orders springsteenien, idéal pour créer ce sentiment de communion un peu basique qui reste quand même incontournable lorsqu’un concert de Rock est réussi…

En quittant la salle, j’entends les inévitables vieux punks – dont je fais partie, je sais, je sais – déplorer le manque de présence des guitares : ils n’ont pas tort, mais, à condition d’admettre que Editors est un groupe parfaitement de notre époque, préoccupé de modernité, pour le meilleur et pour le pire, force est d’admettre que le concert de ce soir a été une démonstration de force. Tom Smith, même s’il a abandonné les tonalités sépulcrales qui firent sa réputation, et même s’il en fait décidément trop sur scène, reste un chanteur et un showman passionnant. S’appuyant sur de nouvelles chansons ayant retrouvé l’excellence des premières années, Editors est un groupe sur lequel il faut à nouveau compter…

« This life requires another name / oh, I got lucky this time in the hunt for atonement »

Il reste encore tant de chansons tristes à composer…

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