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Le journal de Pok
29 janvier 2018

"Interférences" de Jeanne Puchol et Laurent Galandon : Bonjour la France !

InterferencesIl y a 40 ans, en France, le gouvernement contrôlait totalement les ondes et donc les informations y circulant. Cela semble difficile aujourd'hui, à l'époque d'Internet tout puissant, de même imaginer la chappe de plomb sous laquelle des gouvernements dits démocratiques maintenaient la liberté d'expression. Ou même la liberté d'écouter de la musique, puisqu'à l'époque vous aviez le choix sur les ondes entre Johnny et Sardou. Guère plus. Et paradoxalement, ce fut l'amour de la musique - du Rock ("I can't get no Satisfaction!") - qui créa les premières fissures dans la digue, qui finirait par rompre sous Mitterand quelques années plus tard. Inspiré par l'exemple de Radio Caroline (célébré dans le film "Good Morning England"), des amateurs profitent des derniers développements de la technologie pour émette candestinement pendant quelques heures chaque jour, et défier le pouvoir à coup de riffs vengeurs...

"Interférences" raconte l'histoire de trois de ces amateurs qui se lancent dans l'aventure et sont rapidement pris dans le tourbillon de l'Histoire en marche. Traqués par la police, ils seront chacun obligés de prendre des décisions douloureuses qui auront des conséquences sur toute leur vie : ce qui était au départ un jeu presque innocent est devenu un piège qui s'est refermé sur eux.

Sur ce thème passionnant, et sans tomber dans le feelgood excessif du film sur Radio Caroline, Galandon et Puchol dressent un portrait précis et humain d'aventuriers malgré eux, oscillant entre provocation politique (les interviews sur les ondes de personnages de plus en plus polémiques pèseront lourd dans la balance) et inconscience quasi infantile. La dernière partie du livre introduit un élément de "thriller" assez efficace, qui, s'il accélère de manière plaisante la lecture de la fin de "Interférences", détourne peut-être un peu trop l'attention du vrai sujet du livre. Et fait finalement avaler la pilule amère de la victoire des "radios pirates" devenues "radios libres" : au final, comme toujours, c'est le Capital qui a pris le contrôle des ondes, et nous avons troqué un système pour un autre, moins fermé mais pas forcément plus démocratique.

Car c'est bien là l'intérêt de cette jolie BD, au graphisme sage et classique, qui risque bien de passer inaperçue au milieu du flot de parutions caressant plus franchement le lecteur dans le sens du poil : partir d'une aventure individuelle relativement modeste, et qui peut paraître dépassée - quarante ans, tout un monde ! -, pour ouvrir des pistes de réflexion plus que jamais pertinentes sur les limites de la liberté individuelle au sein d'une société accro à la communication mais affolée par la perte de contrôle.

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