"Moi, René Tardi, prisonnier au Stalag IIB, tome 1" de Tardi : la nécessité
Entre Céline (cette haine vivifiante contre la société, la bêtise et la guerre qui grince à chaque page), Primo Levi (toutes proportions gardées, le témoignage du père de Tardi fait écho au calvaire de Primo...) et Spiegelman (comprendre ce qu'a vécu son père pour pouvoir enfin se réconcilier, ou non, avec lui...), Tardi se confronte aux plus grands dans ce "... Stalag IIB" qui témoignerait donc d'une assez folle ambition, s'il n'était marqué plutôt du sceau de la nécessité. Car raconter - et illustrer - le plus justement possible une histoire terrible (qui fait partie de l'Histoire, la grande, terrible du XXe siècle) est évidemment essentiel, face à l'oubli et à la réécriture permanente du passé. On peut évidemment se plaindre que le projet de Tardi ne débouche pas sur un nouveau chef d'oeuvre indiscutable, que la lecture de "... Stalag IIB" soit parfois fastidieuse, que l'équilibre entre le texte (très détaillé, aux sonorités très "pédagogiques") et l'image (splendide, on connaît le talent de Tardi, mais figée, puisqu'il n'y a aucun flux narratif passant d'une "case" à l'autre...) soit maladroit, bref que le "plaisir" ne soit pas au rendez-vous. Mais au final, il ne s'agissait certainement pas de "plaisir" de toute manière ! En tous cas, nous suivrons Tardi père et fils dans le second tome...