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Le journal de Pok
12 juillet 2015

"En Finir avec Eddy Bellegueule" de Edouard Louis : règlement de comptes

En finir avec Eddy BellegueuleMarrant, j'ai eu avec "En Finir avec Eddy Bellegueule" le même problème de fond qu'avec le premier tome de "l'Arabe du Futur" : du coup, je me rends compte que je n'aime pas les biographies qui se réduisent à un règlement de comptes avec sa famille, son passé, ses amis, ou je ne sais quoi. Et qui se contente d'être un document à charge, sans que la "partie adverse" ne puisse avoir la moindre chance de rédemption (non, ça c'est un concept chrétien à la con !)... Sans que l'ennemi ne soit gratifié de la moindre trace d'humanité, plutôt. Bon, si j'avais eu l'enfance de merde de Sattouf en Lybie ou en Syrie, ou si j'avais été torturé comme Eddy Bellegueule a été torturé, je suppose que j'aurais écrit la même chose qu'eux. Ou sans doute pire, en fait. J'aurais peut-être réglé mes comptes au fusil de chasse à canon scié, même. Mais ça ne fait pas de "En Finir avec Eddy Bellegueule" un grand livre que j'aurais envie de recommander à qui que ce soit : la litanie de l'horreur à laquelle on peut facilement résumer ce portrait nauséeux d'un quart monde prolo français borné, brutal, rétrograde, raciste et bien entendu farouchement "contre" toute différence, sexuelle en particulier, provoque plus une fascination malsaine qu'autre chose. J'ai été particulièrement gêné par "l'enchassement" des voix des personnages - avec leur langage primitif, maladroit, laid, dont Bellegueule semble user pour nous prendre à parti, plutôt que pour leur donner la parole : cela m'a semblé un procédé manipulatoire, dégueulasse envers le lecteur aussi bien qu'envers les personnes réelles ici ridiculisées. Pourtant, impossible de nier que Bellegueule a du talent - son livre a une vraie élégance dans sa construction, comme dans sa narration -, et surtout, que son épilogue, magistral, replace "le débat" d'une manière beaucoup plus pertinente : l'homophobie n'est pas qu'un phénomène de classe, comme Eddy l'a cru (pour son malheur).

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