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Le journal de Pok
7 décembre 2013

Sparks à l'Alhanbra (Paris) le mercredi 4 décembre

2013 12 Sparks Alhambra 03

20h55, les Mael Brothers sont là, vieillis mais passablement inchangés finalement après plus de quarante ans de musique, comme prévus avec un matériel minimal : le clavier de Ron et une boite à boucles pour Russell,  pour le premier morceau seulement, le terrible Your Call is Very Important To Us... Ça commence très fort donc - Little Beethoven est mon album préféré de Sparks - et ce d'autant qu'on enchaine avec Carnegie Hall... La voix de Russell reste magnifique malgré ses 65 ans, son énergie scénique inentamée, et Ron arbore son éternel, imperturbable et irrésistible stoïcisme qui est un spectacle à lui seul. Russell, tout en noir comme à son habitude, porte un drôle de culotte de golf, mais on oublie vite cette jolie incongruité. Le son est évidemment parfait, les lumières correctes, même si l'agitation continuelle de Russell rend les photos difficiles. Bref nous sommes partis pour un voyage en douceur au pays enchanté des chansons merveilleuses de Sparks,  la seule inconnue à ce stade étant la setlist : or la setlist va être audacieuse, proposant une visite de morceaux moins connus de la longue discographie des frères, voire même obscurs (Big BoyThose MysteriesAcademy Award Performance). Sommets de cette première partie du set : Good Morning avec Russell courant en rond sur cette mélodie irrésistible,  et un How are you getting Home magnifique en hommage parisien à Leos Carax et son "Holy Motors" magique... sans même parler du rituel et passionnant extrait de Ingmar Bergman, oeuvre audacieuse et certainement moins pop.

Le set accélère logiquement sur la fin, avec les crowd pleasers que sont This

2013 12 Sparks Alhambra 06

Town ou Suburban Homeboy, avant une magnifique conclusion sur When Do I get to sing My Way, instant de pure grâce qui montre à quel point Sparks tutoient l'exceptionnel. Ouaouh ! Tout le monde est debout à applaudir, pour une ovation qui ne semble pas vouloir en finir. Et c'est là que quelque chose se passe : l'émotion comme un courant électrique, ténu mais constant, entre nous et eux, le sentiment d'un moment à part, protégé de la barbarie du monde.  Le rappel va être fantastique, tout simplement, avec une version incomparable de Tryouts - des fans ont déployé une grande banderolle disant "Merci encore" - puis un superbe Number 1 in Heaven, qui voit Russell éjecter son frère de derrière ses claviers pour le faire danser (hein ?) sur le devant de la scène, jusqu'au fameux sourire grimaçant que tout le monde attend et qui déclenche un tonnerre d'applaudissements. On termine élégamment avec "le" morceau composé spécialement pour cette tournée, Revenge. L'émotion culmine désormais, et Ron et Russell n'arrivent plus à quitter la scène : un enfant a remis un t-shirt à Ron exprimant l'amour des fans parisiens, et Ron, qui ne parle pas français comme son frère, nous explique combien il a besoin du public pour trouver l'inspiration, alors que leur musique vit dans une sorte de bulle coupée du monde. Russell contient difficilement son émotion, et les Mael Brothers finissent par quitter la scène,  visiblement à regret, parce que nous avons vécu ce soir l'un de ces moments incroyables où l'amour de la musique s' est comme matérialisé, et où tout a réussi, pendant quelques minutes au moins, à faire sens.

Une courte heure et quinze minutes d'un spectacle parfait, aussi techniquement impeccable - ces chansons ! Cette voix ! - que humainement bouleversant. Oui, merci, merci encore et encore,  Ron (the hardest working man in show business selon son frère admiratif) et Russell, pour savoir ainsi garder la flamme de l'inspiration aussi brillante et chaleureuse. Je ne sais pas quand - ou même si - nous nous reverrons ainsi, mais vous m'avez rendu plus heureux et certainement meilleur depuis quarante ans, avec votre musique. 

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Commentaires
P
Bonsoir et bravo pour votre commentaire. Vous avez tout dit, et très bien. Moi qui les attendais depuis "A Woofer" (soit quatre décennies), je pensais vivre un concert tranquille, entre nostalgie et attendrissement, et je ne m'attendais pas un seul instant à être aussi bouleversé en sortant. La raison tient probablement, en partie, à cette humanité que j'ai cru lire sur le visage de Russell tout au long du concert, quelque chose qui me disait : "Feignons d'ignorer le tragique de cette vie en redoublant de légèreté." Je leur prête peut-être des intentions qu'ils n'ont pas. N'empêche que, cette expression de visage, je ne suis pas près de l'oublier. Bon vent eux et à vous ! Philippe Mothe
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