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Le journal de Pok
10 mai 2013

Rufus Wainwright à la salle HSBC Brasil (São Paulo) le jeudi 9 mai

2013_Rufus_Wainwright_HSBC_Brasil_SP_01« C’est un truc que j’ai toujours redouté, et qui ne m’est arrivé qu’une paire de fois au cours de mon existence de fan de musique « live » : entrer dans la salle pour découvrir qu’il n’y a qu’un instrument ou un ampli sur la scène, signe incontournable que l’on va avoir droit à un concert « solo »... Raaah ! Et ce soir, c’est bien cette douche froide à laquelle nous avons droit en pénétrant – quasi les premiers – dans la superbe salle HSBC Brasil : un splendide piano à queue au milieu de la grande scène, un pied de micro, et basta ! Moi qui rêvais de voir reproduite sur scène la prolifération décadente du magnifique « Out Of The Game », me voici réduit à attendre maintenant le genre de prestations qui, à de très rares exceptions près (Neil Young ? Neil Hannon dans ses bons jours ?), m’ont toujours laissé froid, voire mort d’ennui... Bon, on est là, on a payé, on ne va quand même pas repartir tout de suite, non ? Quelques amuses-gueules et une bonne bouteille de Chardonnay sur notre table (car, je vous le rappelle, il y a généralement des tables (!!!) dans cette salle) au troisième rang, et on prend notre mal en patience.

2013_Rufus_Wainwright_HSBC_Brasil_SP_0822h10 : Rufus Wainwright s’assied à son piano et entame... une chanson que je ne connais pas (The Art Teacher, a priori) ! Il faut dire que je n’ai écouté que le premier – décevant (en 1998, largement oublié depuis...), et le dernier (le septième) album – magnifique, je l’ai déjà dit – de « l’icône gay ». Physiquement, Wainwright fait beaucoup moins jeune que sur ses pochettes de disques, signe d’une vanité quasi féminine qu’il cultive d’ailleurs avec un indéniable sens de la provocation : nous aurons droit durant les 90 minutes qui suivent à de nombreuses remarques sur le fait qu’il se trouve encore très beau, qu’il veut que les lumières soient sur lui pour qu’on le voit bien, etc. etc. Musicalement, et dès le premier morceau, pas de surprise : on est dans cette musique baroque, très opératique qu’il adore (quelqu’un a qualifié son style de « popera », je crois...), avec sa voix de ténor particulièrement impressionnante, son jeu de piano en arpèges plutôt virtuose, et ses chansons baroques et complexes (trop ?).

Avec le son parfait de l’auditorium HSBC, nous allons donc assister à un « récital » quasi-classique d’un artiste en pleine maîtrise de son art, avec des moments stupéfiants, en particulier au niveau vocal : je dois admettre que Rufus est sans doute le chanteur le plus impressionnant techniquement que j’ai vu sur scène (avec Ana Calvi...), du fait de sa technique parfaitement assimilée, bien au-dessus de ce point de vue par exemple d’un Jeff Buckely auquel il est facile de le comparer ! Ah oui, Jeff Buckley... Rufus y va de sa petite anecdote, racontant avec humour sa jalousie envers le succès rapide de ce dernier, puis sa rencontre avec Jeff, quelques semaines seulement avant sa mort tragique. Et il nous interprète Memphis Skyline, composé pour lui, avant d’enchaîner avec une superbe version – légèrement accélérée – du classique de Cohen, Hallelujah (rappelons aux étourdis que la version de Buckley, plus théâtrale, plus lyrique, est inspirée de celle de John Cale !). Ce sera la seule reprise de la soirée, et je m’arroge le droit d’y voir un hommage au grand-père de sa fille...

2013_Rufus_Wainwright_HSBC_Brasil_SP_28Ma plus forte déception quant à ce set, je l’avoue, au delà de l’absence de musiciens pour conférer plus de dimension à la musique, est le choix de Rufus de survoler l’ensemble de sa carrière plutôt que se consacrer à l’interprétation de son dernier album. Il me faudra me contenter ce soir de Out of The Game, Jericho (tous deux à la guitare acoustique), puis du magnifique Montauwk, et, pendant le rappel, d’une version « samba » de Candles, avec l’accompagnement musical du public, Rufus ayant distribué divers instruments de percussion (batterie, maracas, etc.) à des spectateurs : au vu du résultat, assez spectaculaire, je dois bien admettre que c’est le genre de risques que l’on peut prendre dans un pays aussi « musical » que le Brésil. Je me souviens encore de la catastrophe quand Cocoon s’était livré au même exercice à la Maroquinerie en distribuant des instruments au public parisien !!! Ceci dit, le sommet de la soirée aura été pour moi le très beau Going To A Town, avec une parfaite combinaison de paroles fortes (« Im so tired of you America... ») et d’une excellente mélodie.

Bon, il faut admettre que les 90 minutes m’ont quand même semblé longues, d’autant que j’en ai eu un peu assez du cinéma « grande folle gay, gay, gay » que Rufus se sent obligé de faire entre ses chansons. Je suppose qu’une bonne partie du public, composée de couples d’homos, appréciait ce genre de « déclaration d’intention », et j’apprécie la détermination politique de Rufus en faveur des droits des homosexuels... mais ça m’a quand même paru assez lourd, au bout du compte.

Nous sommes sortis de la salle HSBC sceptiques, je dois le reconnaître, mais le public n’a jamais non plus déliré autour de nous, ce soir. Le lendemain, Rufus devait jouer à Porto Alegre, ville où la communauté gay est particulièrement importante, et je lui souhaite un triomphe plus clair qu’à São Paulo. »

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