"La Chute du Faucon Noir" est un film "radical", et comme tel, il n'est ni consensuel (il est impressionnant de relire les débats entre supporters et détracteurs du film de Ridley Scott , à l'époque), ni plaisant (… sauf peut-être pour certains masochistes qui aiment souffrir pendant plus de deux heures !). Le parti pris extrême du film est de ne montrer quasiment que des combats, opposant nos braves soldats américains à une horde de combattants - nègres - sans visages et quasi sans réalité : s'en suit un double effet contradictoire. D'abord une impression de saturation devant l'accumulation de la violence la plus radicale et la plus cruelle, impression qui sert le propos du film, dénonciation hardie de la stupidité de la guerre et de l'incompétence de l'état major US, visiblement incapable d'anticiper la réalité du terrain dans un Mogadiscio "investi" depuis 6 semaines seulement. D'autre part, et c'est de là que vient le malaise profond que crée "La Chute du Faucon Noir", une sensation de dé-réalisation, qui a généré les accusations les plus virulentes, politiquement comme formellement : celle de racisme profond - puisque l'ennemi n'a pas droit à la reconnaissance du film, n'a tout simplement aucune valeur si ce n'est celle d'être de la chair à canon (voir le bilan du désastre : moins de 20 américains tués, contre un millier de Somaliens !) -, et aussi, "esthétiquement", celle de "jeu vidéo" ("shoot'em all !") ou d'absence de caractérisation des personnages. Si ces accusations sont pertinentes, elles me semblent en tout cas être le résultat des choix "artistiques" de Ridley Scott, et non la conséquence d'un manque de maîtrise ou d'une quelconque idéologie pro-américaine douteuse. Dans l'état, "La Chute du Faucon Noir" est un film inconfortable, mais passionnant.