Nettement moins porté par "le buzz" que les deux premiers thriller d'Ellory, "les Anonymes" pourrait pourtant bien être le meilleur des trois livres de ce nouvel auteur (britannique, même si rien ne l'indique dans son style comme dans ses sujets)dont on parle beaucoup. Construit sur un modèle similaire à celui de "Vendetta" - un criminel raconte son trajet personnel, trajet qui vient s'inscrire au coeur de la grande Histoire des Etats-Unis -, "les Anonymes" nous surprend joliment en renversant peu à peu la perception que le lecteur a des "méchants", au fil d'une enquête qui avance, lentement certes, mais se révèle de plus en plus étourdissante dans sa complexité et ses ambiguités. De plus, l'Ellory des "Anonymes" échappe habilement à l'habituelle (et systématique) nécessité du tour de force / du twist final - cette sorte de passage obligé du thriller moderne - pour développer en profondeur un sentiment d'oppression, de malaise, puis finalement de paranoia noire, qui se révèle tout-à-fait effectif. Ajoutons à cela une position politique pour le moins ferme et courageuse quant à l'engagement des Républicains dans les contre-révolutions de l'Amérique Latine (c'est là sans doute le point de vue "européen" de l'auteur, on a du mal à croire qu'un écrivain américain se risquerait à être aussi agressif vis a vis de l'Administration de son pays), et on obtient un beau livre, qui me semble enfin récompenser les espoirs qu'on avait placé en Ellory. Un auteur (enfin) à suivre...