"Cheval de Guerre" de Steven Spielberg : vers Ford...
On rentre à reculons, en renâclant, dans le dernier Spielberg, un peu irrités par un scénario très "enfantin" (ce n'est pas "Mon Amie Flicka", mais pas loin) et par une tendance très lourde au cliché chromo. Puis, peu à peu, le film prend du sens, au fil des aventures feuilletonesques du cheval Joey, quand on comprend que les humains ne sont que des péripéties, et que Spielberg a eu l'idée, pas si simpliste que ça, de filmer la vie, la mort, la guerre, "à hauteur de cheval" : grâce à son habituelle aisance à la mise en scène, ce point de vue là devient peu à peu passionnant, et transcende facilement une accumulation de clichés un peu ridicules (ces Allemands et ces Français qui parlent gentiment anglais, cette scène grotesque de la fabrication des confitures de fraise, etc.). On déboule donc au grand galop dans la dernière demi-heure du film, tétanisante, parfaitement réussie, entre scène apocalyptique dans le No Man's Land de l'horreur des tranchées, et successions de vignettes totalement "fordiennes" : la libération du cheval, la vente aux enchères, la conclusion "classique" qui fait revivre le meilleur d'un cinéma hollywoodien classique. "Cheval de Guerre" est certes une oeuvre bancale, inégale, mais les émotions qu'il fait naître en nous sont dignes d'un grand film.